Grands Colloques - L'attractivité du droit français des sûretés réelles - 118

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EN DROIT INTERNE

dépossession fait jeu égal avec le gage avec dépossession. On le constate,
l'efficacité du gage sans dépossession est plutôt bien assurée grâce au droit
de rétention fictif lorsque l'immobilisation est imposée. Qu'en est-il si la
posture d'attente est choisie ?

B. L'immobilisme choisi
22. Lorsque le droit des procédures collectives ne contraint pas le
gagiste sans dépossession à une attitude passive, ce dernier peut choisir
de se placer délibérément dans une position d'attente. Comment son
droit de rétention fictif va-t-il alors se manifester en droit commun ? En
l'absence de toute emprise matérielle sur le bien affecté, la prérogative
visée ne saurait s'exprimer en un refus légitime du gagiste de se dessaisir
de la chose tant que la créance garantie n'a pas fait l'objet d'un complet
paiement, lequel refus serait opposable erga omnes. De fait, un créancier
qui ne détient pas n'a rien à restituer. Pour autant, si l'on admet que le droit
de rétention fictif attaché aux gages de droit commun produit bien des
effets juridiques, il convient sans doute d'observer les conséquences que la
jurisprudence attache à d'autres droits de rétention fictifs générés par des
gages spéciaux. Or, l'on sait notamment qu'en matière de gage automobile,
le juge permet au créancier de s'opposer valablement à la saisie du bien.
Si fictif que soit le droit de rétention en cause, la jurisprudence considère
ainsi qu'il est invocable à l'encontre de créanciers saisissants, même privilégiés49. Par identité de raison, le droit de rétention fictif, attaché au gage
sans dépossession de droit commun valablement publié, conférerait ainsi
au gagiste une position inexpugnable en cas de conflit avec des créanciers
préférables tels le superprivilège des salariés, le privilège pour frais de justice
ou certains privilèges du Trésor. Au plus fort, si l'on raisonnait par analogie
avec l'article 2340 du Code civil relatif au classement des droits de préférence des gagistes, la rétention fictive pourrait même supplanter le droit de
rétention effectif dès lors que l'inscription du gage sans dépossession s'est
opérée avant la mise en possession du second gagiste. Toutefois, le juge ne
semble pas faire sienne cette analyse puisque, dans un conflit mettant aux
prises le bénéficiaire d'un gage automobile titulaire d'un droit de rétention
fictif et un gagiste détenteur, il n'a pas hésité à admettre la préséance de la
réalité sur la fiction alors même que la mise en possession était subséquente

49. Voir notamment, Cass. com., 15 janv. 1957, D. 1957, jur., p. 267, note J. Hémard,
JCP G 1957, II, n° 10006, note J. Becqué. Adde, L. Aynès et P. Crocq, Droit des sûretés,
op. cit., n° 520.

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