186 EN DROIT INTERNE A. Les droits et les obligations des parties au contrat de gage Le gage est une dation aux fins de paiement à exécution successive réalisée par un démembrement fiduciaire consistant dans l'attribution d'un droit réel de jouissance au créancier. L'attribution de ce droit doit être appréciée en premier lieu. La charge de la jouissance y est corrélative et doit être envisagée en second lieu. La dation en vue du paiement en est la résultante. On ne peut pas dire que les dispositions légales consacrées à ces trois aspects soient d'une clarté suffisante (art. 2389, 2390). 1. L'attribution de la jouissance Existence du droit de jouissance. - Le droit de jouissance est reconnu par la législation sur le livre foncier et sur la publicité foncière. Les textes du Code civil ne le mettent pas clairement en évidence mais l'admettent implicitement. Il suffit d'inverser la perspective pour s'en convaincre. Supposons un instant que le gage soit une sûreté traditionnelle. Le constituant conserverait la pleine propriété de l'immeuble. Il faudrait alors considérer qu'il attribue la jouissance au créancier en lui conférant un droit personnel. Le constituant contracterait dans ce but un contrat de mise à disposition avec le créancier. Dit autrement, le mouvement attributif prendrait pour point d'origine le patrimoine du constituant et pour point d'arrivée celui du créancier. L'article 2390 prévoit exactement le mouvement contraire : ce n'est pas le constituant qui donne à bail au créancier mais ce dernier au constituant 30. Cela présuppose que le créancier est attributaire d'un droit réel de jouissance dont le bail n'est que la conséquence (art. 38 b) L. 1er juin 1924. - art. 28 1° a) D. n° 55-22). Le titre réel du créancier révélé par la publicité lui permet de percevoir les fruits de l'immeuble (art. 2389 al. 1er). Il faut comprendre que le droit de percevoir les fruits se confond avec le droit réel de jouissance. L'article 2389 al. 1er tend même à considérer que la jouissance est une forme de devoir. Il faut y voir une résurgence de la nature fiduciaire de ce droit (art. 2011). Effectivement, le créancier gagiste est titulaire d'un droit réel de jouissance sur l'immeuble mais l'étant es qualité de fiduciaire, il supporte certains devoirs associés. On retrouve le « but déterminé » propre à la fiducie (art. 2011). Modalités de la jouissance. - Il existe trois modes de jouissance : le créancier peut jouir personnellement, il peut faire jouir un tiers ou le 30. V. égal. art. 24 L. n° 2005-842 du 26 juill. 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie : « le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnances les mesures nécessaires pour [...] modifier les dispositions du Code civil pour améliorer le fonctionnement de l'antichrèse, en autorisant le créancier à donner à bail l'immeuble dont le débiteur s'est dépossédé à titre de garantie ».