Grands Colloques - L'attractivité du droit français des sûretés réelles - 46

SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE

B. Singularité du modèle hypothécaire comme modèle unitaire
10. Deux questions méritent d'être posées à la lumière des modèles
explorés : d'une part, pourquoi opter pour un modèle unitaire ? Et si l'on
admet qu'il faille répondre positivement à la première question, pourquoi
d'autre part, choisir un modèle hypothécaire plutôt qu'un système fondé
sur la propriété-sûreté ?
11. Pourquoi un modèle unitaire ? Ainsi qu'il a été dit précédemment,
la pluralité des formes de sûretés est source d'une compétition entre les
différentes garanties existantes. Dès lors, les créanciers vont nécessairement
chercher parmi celles qui leur sont proposées la sûreté la plus efficace,
ce qui apparaît logique et plein de bon sens si l'on se place dans la peau
d'un créancier avisé. Dès lors, rapidement les autres sûretés apparaissent
déclassées par la sûreté dotée des prérogatives les plus à même de lui offrir
la plus grande certitude d'être payé. La reine des sûretés, la carte Joker,
évince naturellement les autres. Dès lors, la permanence de ces sûretés alternatives de moindre efficacité ne se justifie qu'en raison de l'adaptabilité du
mécanisme notamment à l'assiette ou à la créance. Toutes choses qui seront,
toutefois, d'un intérêt bien secondaire face à la certitude d'être remboursé
de sa créance. Proposer un système unitaire c'est donc faire preuve d'un
certain pragmatisme en soulignant que toutes les sûretés doivent avoir la
même efficacité et que les prérogatives qu'elles confèrent doivent être les
mêmes, et ce y compris en cas d'ouverture d'une procédure collective, ainsi
qu'il a été dit. Dire que les prérogatives doivent être les mêmes c'est en
réalité demander à ce que le rang conféré au créancier soit le même selon
la prérogative choisie.
12. D'autre part, si l'on admet qu'il faille reconnaître un modèle unitaire,
reste la question de la forme de cette sûreté unique. Ainsi, là encore, à la
lumière des différents modèles explorés deux options sont envisageables :
l'une reposant sur la logique hypothécaire, la seconde sur une logique
propriétaire. La voie hypothécaire peut sembler préférable pour diverses
raisons qui tiennent autant aux attraits et avantages issus de la nature
hypothécaire de la garantie qu'aux inconvénients de la propriété-sûreté.
La propriété sûreté dispose, certes, d'un atout indéniable, elle exclut du
patrimoine du constituant le bien objet de la garantie, qui est alors définitivement à l'abri des créanciers du constituant. Si cet avantage apparaît
incontestable, les inconvénients de la propriété peuvent toutefois justifier
que l'on s'en détourne.
En effet, tout d'abord, la propriété paraît mal adaptée aux biens d'exploitation. Comment en effet réserver les utilités du bien si l'on en est plus
propriétaire ? Il est, certes, possible de distinguer propriété et possession
et partant de laisser le bien en la possession du constituant à l'instar de ce

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