Grands Colloques - L'attractivité du droit français des sûretés réelles - 78

SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE

partir à la recherche de la reine des sûretés mondiales au risque de faire un
tour du monde en quatre-vingts sûretés ou beaucoup plus ! Il faudrait alors
comparer la réserve de propriété française avec, par exemple, la réserve de
propriété élargie5 ou la réserve de propriété allongée6 du droit allemand,
le nouveau gage sans dépossession du Code civil avec la floating charge7
anglaise ou avec le security interest8 américain, la fiducie française avec le
trust... La démarche conduirait certainement à découvrir des familles de
sûretés, mais aussi à opposer les pays recherchant une sûreté unique à ceux
qui, comme la France, n'hésitent pas à les multiplier.
3. Droit international privé ! - Mais ce n'est pas cet exercice de droit
comparé qui nous a été proposé. Plus que la comparaison entre des droits,
la commande reçue invite à rechercher leur méthode de coordination afin
d'atteindre la reconnaissance en France des sûretés constituées à l'étranger9.
Ainsi libellé, le sujet embrasse tant les sûretés françaises que les sûretés
étrangères. Deux questionnements classiques apparaissent alors. Pour s'en
tenir aux apports essentiels de la réforme de 2006, ces questionnements
du même Code. Il s'agit également de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 qui a accordé un
droit de rétention (fictif) au titulaire d'un gage sans dépossession.
5. Alors que dans la réserve de propriété simple du droit allemand, le bien dont la propriété
est retenue ne garantit que la créance de prix, dans la réserve de propriété élargie celui-ci
garantit aussi d'autres créances que l'acheteur détient contre le vendeur, v. F.-X. Licari,
« Les principales sûretés réelles du droit allemand : fiducie-sûretés et clause de réserve de
propriété », Lamy Droit des sûretés, Étude 523, spéc. n° 523.125.
6. Dans laquelle, le vendeur autorise l'acheteur à disposer du bien vendu sous condition
de cession des créances futures qui naitront de la revente du bien acquis sous réserve de
propriété, v. F.-X. Licari, Lamy précit., spéc. n° 523.130.
7. La floating charge est une sûreté de droit anglais, prisée en matière commerciale pour
sa flexibilité. C'est une charge qui grève l'ensemble de l'actif d'une entreprise au profit d'un
créancier, mais qui a une existence seulement latente tant que le paiement de la dette n'est
pas en danger. Le débiteur peut disposer de ses biens, et même les grever d'autres sûretés.
Mais en cas de difficultés affectant le paiement de la dette, le créancier va provoquer la
« cristallisation » de la charge, qui va frapper tous les biens présents (et tous les biens qui
entrent dans le patrimoine après cristallisation) et suspendre tous les actes concernant les
biens. La cristallisation donne lieu à la nomination d'un administrateur (receiver) qui réalise
l'actif, le gère le cas échéant, et règle la dette à l'égard du créancier, F. Dahan, « La floating
charge : reconnaissance en France d'une sûreté anglaise », JDI 1996, p. 381.
8. Sur lequel, v. J.-F. Riffard, « Le security interest américain », Lamy Droit des sûretés,
Étude 525.
9. K. Kreuzer, « La reconnaissance des sûretés conventionnelles mobilières étrangères »,
Rev. crit. DIP 1995, p. 465 ; G. Khairallah, Les sûretés mobilières en droit international privé,
Economica, 1984 ; G. Affaki, « Les sûretés dans le négoce international », JDI 2000, p. 647 ;
M. Cabrillac, « La reconnaissance en France des sûretés réelles sans dépossession constituées
à l'étranger », Rev. crit. DIP 1979, p. 487 ; F. Rongeat-Oudin, L'efficacité internationale des
sûretés mobilières et l'unification du droit privé, Thèse dactyl. Paris XI (1999) ; Y. Enssad,
Le droit français des sûretés mobilières conventionnelles dans le contexte international et
européen, Thèse Saint-Étienne, (2014).

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