Précis Domat - Droit de l'exécution - 3e - 62

DROIT DE L'EXÉCUTION

en ce sens qu'ils ne concernent que les décisions rendues en matière matrimoniale
ou de responsabilité parentale, en matière d'obligations alimentaires, ou en matière
de mesures de protection en matière civile83. Dans tous les cas, en supprimant l'exequatur, le législateur n'a pas voulu abolir absolument toute garantie, ménageant au
profit de la personne contre laquelle la décision est exécutée la possibilité d'élever
une contestation.
93

Dispense d'exequatur. - Le dispositif de dispense d'exequatur dans le règlement général n'est pas tout à fait identique à celui des règlements spéciaux.
Dans le règlement général de 2012, dit règlement « Bruxelles I bis », les décisions émanant de pays de l'Union sont exécutoires de plein droit sans aucune formalité. Aux termes de l'article 39 de ce règlement : « Une décision rendue dans un
État membre et qui est exécutoire dans cet État membre jouit de la force exécutoire
dans les autres États membres sans qu'une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire ». En toute rigueur, la formulation du législateur européen
n'est pas très heureuse, car si la décision rendue dans un autre État membre a
bien de plein droit un caractère exécutoire en France, elle n'a pas encore stricto
sensu « force exécutoire »84. En effet, la force exécutoire du titre étranger est subordonnée à deux conditions : d'une part, suivant l'article 42 du règlement, le demandeur à l'exécution doit communiquer à « l'autorité compétente chargée de l'exécution » (c'est-à-dire, chez nous, l'huissier de justice) une « copie de la décision
réunissant les conditions nécessaires pour en établir l'authenticité » accompagnée
d'un « certificat » délivré par la juridiction d'origine attestant que la décision est
exécutoire. D'autre part, selon l'article 43, il faut encore que ledit « certificat »
attestant le caractère exécutoire de la décision soit « notifié ou signifié, avant la
première mesure d'exécution, à la personne contre laquelle l'exécution est demandée ». En somme, pour que la décision émanant d'un autre pays de l'Union soit
mise à exécution, il n'y a pas moins de formalités que pour une décision émanant
d'une juridiction française : il faut obtenir une copie authentique certifiée (une sorte
de « grosse »), et il faut que cette copie authentique soit officiellement portée à la
connaissance du destinataire. Pas moins, mais pas plus, sous réserve néanmoins des
problèmes de langue : le règlement européen prévoit les conditions dans lesquelles
l'huissier ou le destinataire peuvent exiger une traduction de la décision.
Dans les règlements spéciaux de 2003 et 2008, relatifs aux décisions rendues en
matière matrimoniale, en matière de responsabilité parentale ou en matière d'obligations alimentaires, le caractère exécutoire en France n'est pas de plein droit : il
fait l'objet d'une « déclaration » de la part du président du tribunal de grande

« Bruxelles I bis ». Sur l'ensemble de la question, v. C. CHAINAIS, F. FERRAND, L. MAYER et S. GUINCHARD,
Procédure civile, Dalloz, 34e éd., 2018, nº 2147 et s.
83. Respectivement règlement (CE) du Conseil nº 2201/2003 du 27 nov. 2003 (dit aussi « Bruxelles II
bis »), relatif à la reconnaissance et à l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de
responsabilité parentale ; règlement (CE) nº 4/2009 du 18 déc. 2008 relatif à la reconnaissance et à l'exécution des décisions en matière d'obligations alimentaires ; règlement (UE) nº 606/2013 du 12 juin 2013, relatif à la reconnaissance des mesures de protection en matière civile.
84. V. cette distinction, supra, nº 89.

■
■

Précis Domat - Droit de l'exécution - 3e

Table des matières de la publication Précis Domat - Droit de l'exécution - 3e