Droit du paiement - Procédures civiles d'exécution - 73

Chapitre 2 - Les conditions de l'exécution forcée

pour un demandeur d'emploi. Selon la Haute juridiction, « un ordinateur utilisé pour la
recherche d'un emploi doit être assimilé à un instrument nécessaire à l'exercice
personnel d'une activité professionnelle »142.
Remarque : la catégorie des « instruments de travail nécessaires à l'exercice de l'exercice
personnel de l'activité professionnelle » (16º) pose des difficultés d'interprétation et une
question d'ordre théorique. Pour ce qui est des premières, un même bien peut, selon les
circonstances, recevoir cette qualification et, partant, être ou non insaisissable. Le véhicule automobile en est une excellente illustration, la Cour de cassation abandonnant la
qualification de bien nécessaire au travail du saisi à l'appréciation souveraine des juges
du fond143. Quant à la question théorique, elle tient à ce que le législateur veut éviter
que, par les saisies d'un créancier, un débiteur soit empêché d'exercer son activité
professionnelle. Pourtant, dans certains cas cette considération n'a plus lieu d'être. Il en
est ainsi lorsque le débiteur est un professionnel indépendant, soumis à une procédure
de liquidation judiciaire ; la règle est alors celle de l'arrêt de l'activité144. Dans une telle
situation, l'exécution forcée est collective et le périmètre des biens intouchables doit logiquement se restreindre145. Les considérations d'humanité fondant l'insaisissabilité des
biens nécessaires au travail du débiteur passent logiquement au second plan146.
168 Dérogations au profit de certains créanciers. − Les « biens mobiliers nécessaires à la vie
et au travail du saisi et de sa famille » restent saisissables dans plusieurs cas visés à l'article
L. 112-2 du Code des procédures civiles d'exécution. Ils le demeurent tout d'abord « pour
paiement de leur prix ». L'article R. 112-3 du même code précise qu'il s'agit des sommes
dues au fabricant ou au vendeur ou à la personne qui a prêté l'argent pour acheter, fabriquer ou réparer la chose saisie. L'idée qui inspire cette disposition est la même que celle
qui conduit, en certains cas, le législateur à instituer un privilège spécial au profit du
vendeur à crédit ou du prêteur de deniers. Certes, il est des choses nécessaires à la vie et
au travail du débiteur et qu'il importe donc de protéger. Pour autant, il serait choquant de
sacrifier les intérêts de celui qui a permis leur acquisition. Indirectement, cette dérogation
profite aux débiteurs en favorisant l'acquisition à crédit de ces mêmes biens.

Le législateur prévoit d'ailleurs une exception à cette dérogation, invitant donc à un
retour au principe de totale insaisissabilité. Même pour le paiement de leur prix, ces
« biens mobiliers nécessaires à la vie et au travail du saisi » sont insaississables, lorsqu'ils
appartiennent à des personnes bénéficiaires de prestations d'aide sociale à l'Enfance
(CPCE, art. L. 112-2, 6º). La situation de faiblesse de ces possibles débiteurs justifie
cette protection accrue de leurs biens.
169 Dérogations tenant aux circonstances. − Les biens de l'article L. 112-5, 5º restent
également saisissables :

- « s'ils se trouvent dans un lieu autre que celui où le saisi demeure ou travaille habituellement ». L'idée qui fonde cette dérogation est que, dans l'hypothèse visée, le
bien n'est pas vraiment indispensable au saisi.

(142) Cass. 2e civ., 28 juin 2012, nº 11-15055, Bull. civ. II, nº 126 ; D. 2012, p. 1941, note L. LAUVERGNAT ; Procédures
2012, comm. 278, obs. R. PERROT ; Rev. trav. 2012, p. 455, obs. A. LYON-CAEN.
(143) Cass. 2e civ., 15 déc. 2005, nº 04-14600 ; Bull. civ. II, nº 334. Les juges du fond retiennent le caractère saisissable
de l'automobile du débiteur, lui permettant de se rendre sur son lieu de travail et d'en revenir.
(144) C. com., art. L. 640-1.
(145) Le principe de non-reprise des poursuites individuelles, lié à la clôture de la procédure pour insuffisance d'actif,
pourrait toutefois tempérer cette conséquence, en raison de la volonté de permettre le rebond du débiteur, postérieurement à la clôture de la procédure. Au contraire, l'éventuel prononcé d'une sanction de faillite personnelle
renforce l'argument.
(146) Le droit réserve cependant la possibilité pour le juge-commissaire d'allouer des subsides au débiteur liquidé.

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