Hors collection - Finances publiques citoyennes - 10

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FINANCES PUBLIqUES CItoyENNES

intuitivement faire sens et ne pas se réduire à une simple redondance, c'est en
raison justement, je pense, des dévoiements de la pratique politique et d'un
processus d'aliénation qui s'est subrepticement développé dans les esprits ;
on est passé de l'idée de finances du peuple à l'idée plus abstraite et plus
voilée de finances de l'État (et de ses démembrements ou satellites), et finalement à une certaine tendance des autorités dirigeantes à s'approprier les
finances du peuple, à les considérer et les utiliser comme leur chose propre.
L'avènement et le développement de l'État-providence ont encouragé cette
tendance. Les finances publiques dans l'État-gendarme d'autrefois (ou État
« minimalitaire » selon l'heureuse formule de Marcel Prélot) étaient balisées
et encadrées par les principes ascétiques libéraux qui les sous-tendaient :
elles devaient se réduire au strict nécessaire et les pouvoirs publics devaient
prélever et dépenser le moins possible. Les finances publiques de l'Étatprovidence ne connaissent, elles, aucune limite de principe et on s'est
dangereusement habitué dans ce domaine à l'idée d'un État faustien, où les
pouvoirs publics peuvent tout faire, tout décider, sous réserve bien entendu
de rester dans les clous ou garde-fous fixés par la réglementation juridique.
Derrière l'évocation de finances publiques citoyennes résonne, précisément,
comme un rappel à l'ordre, une aspiration à un changement d'état d'esprit
et à un retour aux sources rétablissant résolument les citoyens au centre
des finances publiques ou, en d'autres termes, replaçant résolument les
finances publiques au service des citoyens.
on peut faire, à cet égard, un parallèle : on parle couramment aujourd'hui
de « comportements citoyens » de la part... des citoyens ; cette manière de
s'exprimer ne se réduit pas, là non plus, à un pléonasme : elle dénote plus
exactement une exigence morale, un devoir pour les citoyens d'agir en bons
citoyens, en citoyens responsables, soucieux de protéger et de respecter les
intérêts de la Cité dont ils font partie. Le concept de finances publiques
citoyennes me paraît dénoter une exigence éthique similaire, mais au niveau
cette fois des autorités publiques - une exigence impliquant que, dans leur
gestion financière, elles soient irréprochables et aient essentiellement le
souci du bien de la Cité et des citoyens au nom et pour le compte desquels
elles ont reçu mission et pouvoir d'agir.
Remettre les finances publiques au service de la Cité, cela implique au
premier chef d'exclure systématiquement les décisions financières inspirées,
non pas par l'intérêt des citoyens, mais par celui des dirigeants publics en
place : la pratique, et pas seulement en France, offre hélas - en marge des
cas proprement délictueux de malversations - de multiples exemples de
dépenses publiques initiées par les autorités à des fins de clientélisme électoral, ou pour procurer des prébendes ou sinécures à des amis politiques, ou
encore dans des desseins purement démagogiques en vue de valoriser leur
image personnelle auprès de l'opinion, sans parler des avantages exorbitants
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