Hors collection - Finances publiques citoyennes - 58

CoNtEXtUALISAtIoN Et PRoBLÉMAtISAtIoN GÉNÉRALES

d'évoluer dans le temps et la Révolution française, qui l'a réintroduit dans
le vocabulaire juridique sans toutefois le définir précisément autrement
qu'en décrivant quels droits ouvre ce titre et comment il se perd, ne l'a ni
inventé ni cristallisé. Le sens qui lui est donné à cette période, au demeurant
évolutif selon les phases, n'est pas le même qu'à Athènes ou sous l'Ancien
Régime même si la conception athénienne va rétroagir sur elle. Ainsi la
citoyenneté à la Révolution est liée à certaines prérogatives où se mêlent
étroitement droits politiques et obligations contributives. Ainsi, si les
articles 13 et 14 de la Déclaration des droits de l'homme y font référence, le
titre V de la Constitution du 3 septembre 1791 intitulé « Des contributions
publiques », ne fait plus mention du citoyen. Les premiers contribuables
ne sont pas qualifiés de citoyens, quand bien même seraient-ils électeurs.
Certes la Constitution du 24 juin 1793 disposait, dans son chapitre sur les
« Contributions publiques », que « Nul citoyen n'est dispensé de l'honorable
obligation de contribuer aux charges publiques » (art. 101), mais, pour ne
rien simplifier, la même Constitution dissociait aussi la citoyenneté de la
nationalité dans son article 418. Seule la Constitution de l'an III établira un
lien entre impôt et citoyenneté en faisant du premier une condition de la
seconde, l'article 8 du titre II consacré à « l'État politique des citoyens »
disposant en effet que « Tout homme né et résidant en France, qui, âgé de
vingt et un ans accomplis, s'est fait inscrire sur le registre civique de son
canton, qui a demeuré depuis pendant une année sur le territoire de la
République, et qui paie une contribution directe, foncière ou personnelle,
est citoyen français. ». De là, la formule d'E. Allix : « on ne peut être contribuable sans être électeur ni citoyen »19.
Pour autant, l'impôt fait moins le citoyen en tant que contributeur qu'en
tant que possesseur du fait du suffrage censitaire établi dans les différents
régimes de la Révolution : tous les contribuables ne seront pas électeurs
en raison du montant du cens qui, lui aussi, variera selon les périodes et
les régimes. Le lien réputé « sans faille » entre le contribuable, l'électeur
et le citoyen, en particulier du fait de la mise en place d'impôts directs
en 1791, n'a donc jamais été aussi parfait qu'il n'y paraît et sera de toute
façon « très vite altérée avec la réapparition des impôts indirects, pour se
distendre totalement avec l'instauration du suffrage universel »20. S'ajoute
18. « Tout homme né et domicilié en France, âgé de vingt et un ans accomplis ; - Tout
étranger âgé de vingt et un ans accomplis, qui, domicilié en France depuis une année -
Y vit de son travail - Ou acquiert une propriété - Ou épouse une Française - Ou adopte un
enfant - Ou nourrit un vieillard ; - Tout étranger enfin, qui sera jugé par le Corps législatif
avoir bien mérité de l'humanité - Est admis à l'exercice des Droits de citoyen français. ».
19. Traité élémentaire de science des finances, rousseAu, 4e éd., 1921, p. 362.
20. J.-C. MArtinez, Le statut de contribuable. Tome 1 - L'élaboration du statut, LGDJ,
coll. Bibliothèque de science financière, t. XV, 1980, p. 33.

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