Hors collection - Droit(s) et Street Art - 163

GÉRALDINE GOFFAUX CALLEBAUT

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les artistes. Dans ce cadre, les possibles qualifications de recel ou d'objets
sensibles peuvent s'avérer délicates pour les acteurs du marché de l'art.

1. La qualification de recel
Certaines pratiques consistent pour des tiers (c'est-à-dire ni l'artiste
ni le propriétaire de l'immeuble) à arracher des œuvres de rue de leur
support. Cette hypothèse a été mise en lumière en février 2013 à l'occasion
de la vente à Miami d'une œuvre de Banksy qui avait été volée à Londres
en 2011. Des œuvres d'Invader sont elles aussi arrachées, jusqu'à vider
certaines villes de son travail20. Ces vols d'œuvres se multiplient et se
traduisent parfois par des dégradations des immeubles, certains n'hésitant
pas à abîmer le support pour y arriver21. Dès lors, peut-on considérer
que ces œuvres issues de dégradations sont des choses hors commerce ?
L'article 1598 du Code civil, reprenant l'ancien article 1128, exige que les
conventions portent sur des choses qui sont dans le commerce22. À partir
de là, la doctrine et la jurisprudence jugent hors commerce les objets d'origine illicite, comme les objets de contrefaçon23. Ce peut être le cas si ces
œuvres ont été arrachées sur des bâtiments publics ou privés, opérant ainsi
des dégradations sur des immeubles.
Si cette qualification est retenue, en droit civil, le contrat sera nul. En
outre, le droit pénal s'applique : il s'agit bien de la soustraction frauduleuse
de la chose d'autrui ou de la dégradation de la chose d'autrui ; la maison
de ventes ou le marchand peut être considéré comme complice et l'acheteur de la chose comme receleur. Il reste qu'en matière civile comme en
matière pénale, l'action est difficile à mettre en œuvre. En matière civile,
il faut rappeler que l'affaire Banksy a révélé des difficultés liées au droit
international, courantes en la matière. S'agissant des poursuites, la matière
pénale rend les choses plus complexes puisque l'opportunité des poursuites
dépend du procureur. Enfin, s'agissant de l'auteur de l'action, il semble que
la personne qui a intérêt à agir est le propriétaire du support.

20. Entretien avec Franck Le Feuvre, galeriste.
21. Certains allant même jusqu'à utiliser des marteaux-piqueurs pour les déceler de leur
support. Voir S. Bocelli, « Sobre, il essaie de voler une œuvre de street art au marteaupiqueur », 25 févr. 2014, www.madmoizelle.com/voler-street-art-marteau-piqueur-233898
(dernière visite le 24 janv. 2017).
22. V. notamment la thèse de F. Paul, Les choses qui sont dans le commerce au sens de
l'article 1128 du Code civil, 2002, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », t. 377.
23. Cass. com., 26 oct. 1999, Bull. civ. IV, n° 185 ; 24 sept. 2003, Bull. civ. IV, n° 147 ;
D. 2003.2576.
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