Hors collection - Droit(s) et Street Art - 72

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ART SUBVERSIF ET DROIT D'AUTEUR

d'une nouveauté13. Sans entrer dans ces débats, on relèvera qu'on ne peut
affirmer que tout ce que l'on rattache au street art répond à la condition
d'originalité. Certaines inscriptions - qu'on qualifie généralement de tags
ou de graffitis - n'ont rien d'originales... En revanche, on doit admettre que
ces créations sont originales dès lors qu'elles sont le reflet de la personnalité
du créateur ou encore, selon les termes de la Cour de justice de l'Union
européenne, qu'elles constituent « une création intellectuelle de l'auteur
reflétant la personnalité de ce dernier et se manifestant par les choix libres
et créatifs de celui-ci. »14 À l'évidence, nombre de créations de rue, calligraphies ou fresques plus élaborées, répondent à cette condition. Pour
autant, des difficultés peuvent apparaître notamment en raison de la reprise
fréquente de thèmes développés par d'autres15. Toutefois ces difficultés ne
sont pas propres à l'art de rue.
8. La forme ou concrétisation, ensuite, est le second critère de la
protection. Pour être protégée, une œuvre doit être concrétisée c'est-à-dire
mise en forme. En d'autres termes, les idées et concepts ne sont pas, en
soi, protégeables16. Selon la formule retenue par la Cour de cassation, « le
droit d'auteur ne protège les créations dans leur forme sensible qu'autant
que celle-ci est identifiable avec une précision suffisante pour permettre sa
communication »17. S'agissant des créations issues du street art, la condition
est manifestement remplie puisque l'œuvre est matérialisée : elle est apposée
sur les murs, « les trottoirs, le métro, la chaussée, le mobilier urbain, les
boîtes à lettres, les abribus, les câbles électriques, les panneaux indicateurs,
les panneaux publicitaires, les trottoirs, le mobilier urbain, les boîtes à
lettres, les abribus... »18.
On ajoutera que, pour certains juges, et sans doute à juste titre, le choix
du support et son emplacement sont des éléments permettant de caractériser l'originalité de la création. Ce faisant, les deux critères se rejoignent.
Confronté aux fameux Space Invaders, créations représentant une créature
tirée d'un jeu vidéo dans lesquelles les pixels sont représentés par le biais
13. En ce sens, P.-Y. Gautier, op. cit., n° 35.
14. CJUE, 1er déc. 2011, aff. C-145/10, Painer, D. 2012, p. 471, note N. Martial-Braz ;
Comm. com. électr. 2012, n° 26, note C. Caron ; Legipresse 2012, p. 161, note J. Antipass ;
RIDA, avr. 2012, p. 325, obs. P. Sirinelli.
15. Sur ces difficultés, v. G. Goffaux Callebaut, op. cit., spéc. p. 35.
16. Selon une formule classique, les idées sont de libre parcours. Trib. civ. de la Seine,
19 déc. 1928, Ann. Prop. ind., 1929, p. 181 : « dans le domaine de la pensée, l'idée demeure
éternellement libre et ne peut jamais devenir l'objet d'une protection privative ».
17. Cass. com., 10 déc. 2013, n° 11-19872, inédit, Propr. intell. 2014, n° 50, p. 51 et s., obs.
J.-M. Bruguière ; Comm. com. électr. 2014, comm. 13, note Ch. Caron ; RTD com. 2014,
p. 103 et s., obs. F. Pollaud-Dulian ; Gaz. Pal. 2013, n° 353, p. 5, concl. B. Pagès ; Gaz. Pal.
2014, n° 65, p. 16, obs. L. Marino ; LPA 2014, n° 38, p. 7, note V. Tellier-Cayrol.
18. Énumération de D. Guével, op. cit., n° 10.
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