Hors collection - Droit(s) et Street Art - 85

NOÉ WAGENER

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(ne serait-ce qu'aux biens des personnes privées en charge d'une mission
de service public). Tout comme, autre exemple, le traitement original de
l'infraction de graffiti sur propriété municipale, tel que prévu à l'article 44-1
du Code de procédure pénale, trouve déclinaison, moyennant quelques
adaptations (alinéa 6 de l'article 44-1), du côté des propriétés privées.

B. La protection de la propriété publique par la propriété
littéraire et artistique
La propriété publique confrontée au street art bénéfice aussi d'une
protection partiellement augmentée du côté de la propriété littéraire et
artistique. La règle de droit commun est bien connue : à l'instar de l'architecte, l'artiste - et en particulier le graffeur - peut s'opposer à la destruction
ou à l'altération de sa création au nom du droit au respect de l'œuvre qu'il
tire de son droit de propriété intellectuelle. Cependant, une atténuation
forte de cette règle existe en matière architecturale, dans la mesure où la
jurisprudence interdit à l'auteur de prétendre imposer une intangibilité
absolue de son œuvre. La vocation utilitaire de l'édifice, qui implique
au contraire le droit pour le propriétaire « d'apporter des modifications
lorsque se révèle la nécessité de l'adapter à des besoins nouveaux »6 doit
également être prise en compte, en effet.
Or, dans cette recherche d'équilibre entre les intérêts de l'auteur et ceux
du propriétaire, la personne publique dispose, comparativement au propriétaire privé, d'une marge de manœuvre supérieure. Le Conseil d'État l'a
fermement rappelé à diverses reprises, en particulier dans un arrêt Agopyan
du 11 septembre 20067. Le droit de l'auteur doit être concilié avec les nécessités du service public, en ce sens que le propriétaire public bénéficie d'un
droit à modifier une œuvre dès lors que ces modifications « sont rendues
strictement indispensables par des impératifs esthétiques, techniques ou de
sécurité publique, légitimés par les nécessités du service public et notamment la destination de l'instrument ou de l'édifice ou son adaptation à des
besoins nouveaux ». Une appréciation des nécessités du service public qui
peut parfois se révéler relativement souple, comme le prouve une affaire
récente concernant le musée de l'Arles antique (Bouches-du-Rhône)8.
6. Cass. 1re civ., 7 janv. 1992, n° 90-17534, Bonnier c. Bull, D. 1993, p. 522, note B. Edelman ;
RDI 1992, p. 326, obs. P. Malinvaud et B. Boubli ; RTD com. 1992, p. 376, obs. A. Françon.
7. CE, 11 sept. 2006, n° 265174, Agopyan c. Ville de Nantes, AJDA, 2006, p. 2189, note
J.-D. Dreyfus ; D. 2007, p. 129, obs. M.-C. de Montecler, note J. Charret ; RDI 2006, p. 486,
obs. J.-D. Dreyfus ; RTD com. 2007, p. 100, obs. F. Pollaud-Dulian.
8. CA Aix-en-Provence, 7 janv. 2016, n° 13/08411 ; sur cet arrêt, v. Ph. Mouron, « Droit
moral de l'architecte et nécessités du service public culturel », Dalloz IP/IT, 2016, p. 302.
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