Contextes - Littératures populaires du droit - 151

Le DROIT POPULAIRE

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contraint le journal à abandonner totalement celui-ci. Ainsi, la politique
porte deux coups qui seront fatals à l'éphémère publication.
Le Droit Populaire n'apparaîtra jamais, à l'échelle de la littérature
juridique populaire, que comme un bricolage très imparfait et éphémère.
L'étroitesse de l'équipe productrice du journal, tant par sa taille, que par
l'absence de diversification de ses membres, mais aussi la logique du marché
de la presse ainsi que le manque d'appui politique, concourent à provoquer son échec. Le caractère encore méconnu de la presse juridique dédiée
aux non-juristes à la Belle Époque rend difficile de le resituer dans un
mouvement d'ensemble. Alors que l'édition de livres consacrés au droit
à destination des non-juristes se poursuit, selon sans doute des modalités
changeantes qu'il importerait de définir précisément76, les périodiques
juridiques continuent quant à eux, à s'adresser en priorité aux universitaires
ou aux professionnels du droit à travers les revues77. Certaines tentatives
semblables se font néanmoins sentir vers la fin du siècle, mais leur succès
se montre encore plus éphémère78. Malgré d'indiscutables imperfections,
notamment dans la pédagogie, pas assez approfondie, le journal d'Oudin
participe modestement à la socialisation des outils juridiques. en cherchant
à transmettre le droit à un public qui l'ignore, mais surtout à former son
regard critique en partant de l'observation juridique, il apporte sa pierre
à la démocratisation d'un savoir socialement circonscrit. Il a apporté une
des premières couches à la fondation d'une conscience juridique populaire.

76. Les investigations bibliographiques menées par Laetitia Guerlain sur cette littérature
mettent en évidence une évolution, sous la Troisième république, des ouvrages « à l'usage
de ». Alors que ceux-ci s'adressaient en général à « tous », ou à des professionnels de la
justice, le nombre de ceux destinés à des catégories socio-professionnelles diverses augmente
considérablement à cette époque. Pour illustration de ce propos, cf. dans l'ordre Alfred
Franque, Code de la liberté individuelle, renfermant les cas où un citoyen français peut
être privé de cette liberté ; à l'usage de tous, Lefebvre, 1830 ; Boucher d'Argis (AntoineGaspard), Code de simple police, à l'usage des juges de paix, commissaires de police, maires et
adjoints, B. Warée, oncle, 1822 ; Armengaud (eugène), Instructions pratiques à l'usage des
inventeurs, commentaire raisonné des lois qui régissent actuellement les brevets d'invention
dans les principaux pays industriels, l'auteur, 1882.
77. Cf. Fatiha Cherfouh, Le juriste entre science et politique : la Revue générale du
droit, de la législation et de la jurisprudence en France et à l'étranger (1877-1938), Thèse
de doctorat en droit, sous la direction de Nader Hakim et Marc Malherbe, université
Bordeaux IV, 2011.
78. Le Droit des gens se limite principalement à rendre public le prix des actes, afin d'éviter
les abus. Il n'en sera publié qu'un seul numéro. Cf. Le Droit des Gens, 1894/04/20 (n° 1).
L'avocat à la Cour d'appel de Paris, César Bouchage, tente quant à lui de remettre sur pieds
un journal comparable à celui du Droit Populaire, agrémenté cette fois de modèles d'actes.
Il n'en publiera que trois numéros. Cf. Le Plaideur, journal de droit pratique pour tous,
paraissant tous les dimanches, 1894/05/06 (n° 1).

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