Systèmes Cours - Les Constitutions de la France - Tome 3 - 1re - 54

Les Constitutions de la France

R. Capitant, J. Barthélémy, L. Duguit, M. Hauriou, R. Carré de Malberg,
B. Mirkine-Guetzévitch, des hauts responsables de l'administration, y
compris militaires, dont évidemment Ch. de Gaulle. Les discours de
Bayeux du 16 juin 1946 et d'Épinal du 29 septembre 1946 sont
d'ailleurs un concentré des propositions réformatrices des années
1930. Ils annoncent les grands traits de la Constitution de 1958.
La dénonciation du parlementarisme absolu et du régime ultrareprésentatif dans les années de l'entre-deux-guerres rend compte
de l'évolution des régimes politiques contemporains. Le dualisme
des pouvoirs n'y est qu'apparent. La séparation fonctionnelle des
pouvoirs exécutif et parlementaire n'est qu'un dogme qu'exprime un
langage dépassé et figé datant de la monarchie constitutionnelle
française disparue. Elle ne correspond en rien à la réalité de
l'exercice des pouvoirs dans un État moderne doté d'un régime
parlementaire, ce qui fait dire à L. Blum que la séparation des
pouvoirs est « une fiction du droit ». C'était déjà vrai du temps où les
assemblées parlementaires concentraient les prérogatives législatives
et exécutives soit que celles-ci leur étaient dévolues en vertu des lois
constitutionnelles, soit qu'elles se les accaparaient, comme sous la
Troisième République, en soumettant le pouvoir exécutif. C'est
encore plus vrai depuis la crise de 1929 : « La vérité, écrit le leader
du Front populaire dans La Réforme gouvernementale, c'est qu'à tout
moment et sur tout objet, le législatif et l'exécutif vivent dans un état
de pénétration, de dépendance réciproque, et que cette collaboration
continue est la loi même de notre activité gouvernementale ». Ce
sentiment est partagé par B. Mirkine-Guetzévitch pour qui la
démocratie moderne se confond avec le parlementarisme
majoritaire, régime de collaboration des pouvoirs exécutif et
parlementaire par le truchement d'une majorité législative. L'idée
d'une séparation des deux pôles du pouvoir d'État est reléguée au
panthéon des théories de la monarchie constitutionnelle (R. Capitant,
B. Mirkine-Guetzévitch). La notion de contrat de législature (L. Blum)
apparaît comme une condition de la stabilité politique.
Boris Mirkine-Guetzévitch (1892-1955). Auteur russe d'origine ukrainienne, Boris Mirkine-Guetzévitch a
contribué au renouveau du droit constitutionnel dans les années qui suivent la fin du premier conflit
mondial et qui voient apparaître sur la scène européenne de jeunes États acquis à la démocratie
parlementaire. Son ouvrage fondamental, Les Constitutions de l'Europe nouvelle Delagrave 1930, est un
hymne à la force du droit constitutionnel écrit, instrument de rationalisation du pouvoir qui soumet « au
droit tout l'ensemble de la vie collective ». Il loue l'État de droit et les Constitutions placées au sommet des
ordres juridiques internes et s'intéresse aux mécanismes juridiques constitutionnels qui organisent presque
scientifiquement les relations entre les pouvoirs publics. Présenté trop souvent mais à tort comme le père du
« parlementarisme rationalisé », Mirkine-Guetzévitch adhère au contrôle de constitutionnalité des lois
comme une véritable garantie des libertés, juge tardivement les partis politiques comme des rouages
essentiels de la démocratie parlementaire et approuve les mécanismes et procédures qui assurent au
droit international une force en droit interne. Malheureusement, son enchantement sur la codification

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