Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ? - 187

CLAIRE SOURzAT

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dans notre pays, que soit ainsi attenté à la liberté de la presse et à la
protection de la liberté d'expression »10.
On peut alors légitimement s'interroger sur la justification du maintien
ou de la suppression de la règle.
D'une part la sanction pénale n'apparaîtrait plus suffisamment infamante
à ceux dont l'honneur est atteint pour qu'ils saisissent les tribunaux correctionnels11. Or, les garanties prévues par la loi de 1881 sont initialement
corrélées au risque pénal qu'encourt le locuteur12.
D'autre part, supprimer le parallélisme des formes en fondant la réparation des abus de liberté d'expression sur l'ex article 1382 du Code civil
revient certainement à opérer une dépénalisation de fait. Le locuteur se
trouverait alors plus facilement exposé au prononcé d'une sanction civile
dont la logique hésite d'ailleurs entre réparation et rétribution13. L'équation
entre liberté d'expression et protection de l'honneur pourrait bien s'en
trouver déséquilibrée.
Finalement, si s'affranchir des contraintes de formes du droit de la presse
devant la juridiction civile semble assurer au plaignant un renforcement
du droit d'accès au juge14 (I) la possibilité de contourner le labyrinthe
procédural de 1881 constitue sans doute une menace pour la protection
de la presse (II).

I − LA PÉRILLEUSE MISE EN ŒUVRE
DU PARALLÉLISME
Déterminer si l'observation du parallélisme des formes devant les juridictions civiles et pénales constitue une entrave démesurée à l'exercice du
10. V. le sommaire de l'amendement. Pour de plus amples développements sur ce point,
v., « Projet de loi égalité et citoyenneté : La commission spéciale de l'assemblée nationale
revient sur la répression des infractions de presse », Légipresse 2016, n° 343.
11. V. sur ce point Viriot-BarriaL D., art. préc.
12. En ce sens, Dreyer E. dénonce le caractère dogmatique de « la logique d'unification » de la Cour de cassation. « Partant d'une idée fausse (le fait que les sanctions civiles
équivaudraient aux sanctions pénales en matière de presse, de sorte qu'elles devraient être
accompagnées des mêmes garanties), [la logique unificatrice] s'avère déconnecté de toute
réalité. Dreyer E., « L'accès au juge civil en matière de presse », art. préc.
13. V. sur ce point, Gras F., « L'indemnisation des atteintes à la vie privée », https ://www.
cairn.info/article_p.php?ID_ARTICLE=LEGI_020_0021#no42
14. Pour de plus amples développements sur cette idée, v. Droin N., « La dépénalisation
de la diffamation et de l'injure favorise-t-elle l'accès au juge des victimes des propos »,
in, ss. la dir. de Donnier V. et Laperou-Scheneider B., L'accès au juge : recherche sur
l'effectivité d'un droit, Bruylant, 2013, spéc. p. 189 s.

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