Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ? - 204

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L'ADAPTATION DU RÉGIME DE RESPONSABILITÉ PÉNALE

sur Internet. En outre, il convient de relativiser les défauts de l'anonymat.
Dans certaines situations, il se révèle, en effet, indispensable. On songe
ici inévitablement aux révolutions arabes, parfois appelées « révolution
2.0 » tant Internet et son anonymat ont représenté une arme essentielle.
Comme le relève la Cour européenne des droits de l'homme, « l'anonymat
est de longue date un moyen d'éviter les représailles ou l'attention non
voulue »9. Surtout, il faut préciser qu'il a toujours existé des écrits dont
l'auteur est anonyme en dehors d'Internet, et que l'impossibilité de se
défendre pour la personne visée est toute relative lorsqu'il s'agit d'Internet
tant il est facile de publier des propos sur cet espace. Il est donc nécessaire
de trouver un équilibre satisfaisant entre le souci « de respecter la volonté
des usagers de l'Internet de ne pas révéler leur identité » et la nécessité « de
prendre des mesures et de coopérer pour retrouver la trace de ceux qui
sont responsables d'actes délictueux »10. Dans ce cadre, la loi prévoit déjà
à l'heure actuelle des obligations de collecte d'informations à la charge des
prestataires techniques11.
Avant le Sénat, en 2015, la Commission nationale consultative des droits
de l'homme a proposé que la liste des personnes responsables soit élargie
au responsable de l'association ou de la structure sous-jacente au site web
éditeur lorsque le directeur de publication et l'auteur sont anonymes12.
Interrogé par le Sénat, le syndicat de la magistrature admet l'existence de
ces difficultés mais se dit défavorable à la proposition de la Commission,
sans présenter d'autre solution13. Peut-être parce qu'il n'en existe pas
ou, plus précisément, parce qu'une adaptation sur ce point ne serait pas
pertinente. La consécration et la protection de la liberté d'expression ne
supposent-t-elles pas de faire des concessions, en particulier au xxie siècle,
en particulier à l'heure d'Internet ? Il est sans doute nécessaire d'admettre
que cet instrument « précieux » d'expression présente inévitablement des
risques et qu'il empêche parfois, malgré un régime solide et pertinent,
9. CEDH, Gr. Ch., 16 juin 2015, Delfi AS c/ Estonie, 16/06/2015, requête n° 64569/09,
§ 147 ; Piot P., « Commentaires sur Internet : des obligations renforcées pour les sites
d'actualité et les médias professionnels », Gaz. Pal., 30/09/2015, n° 273-274, p. 20 ; Derieux
E., « Responsabilité d'un portail d'actualités du fait de commentaires diffamatoires postés
par des internautes », Lamy Droit de l'immatériel, 01/08/2015, n° 118, p. 26 ; Costes L.,
« Responsabilité du portail d'information Delfi », Lamy Droit de l'immatériel, 01/07/2015,
n° 117, p. 41.
10. Ibid, § 44. Renvoi à la Déclaration sur la liberté de la communication sur l'Internet
adoptée par le Comité des ministres du Conseil de l'Europe ne 28 mai 2003 (principe n° 7).
11. Article 6 II et III de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance en l'économie numérique.
12. CNCDH, « Avis sur la lutte contre les discours de haine sur Internet », préc.
13. Observations du syndicat de la magistrature devant la mission d'information de la
commission des lois du Sénat relative à la loi du 29 juillet 1881 et Internet, www.syndicatmagistrature.org.

http://www.syndicat http://www.magistrature.org

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