Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ? - 22

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ANALYSE DES DÉBATS PARLEMENTAIRES

République : l'outrage qui est actuellement puni par le Code pénal de droit
commun, c'est l'outrage par gestes, menaces ou bien par écrits non rendus
publics. La loi n'avait pas à punir l'outrage résultant d'écrits rendus publics
par l'excellente raison que les lois spéciales de 1819 et de 1822 punissaient
cet outrage spécial. Mais si aujourd'hui, ayant supprimé ces lois, vous ne
comblez pas la lacune, quel sera le résultat ? C'est que l'outrage résultant
d'écrits rendus publics restera un délit jouissant d'une impunité absolue.
Si vous rejetez notre rédaction qui punit l'outrage envers le président de
la République d'une peine de six mois à deux ans d'emprisonnement, la
peine serait six mois à cinq ans d'emprisonnement ; Ainsi donc, de deux
choses l'une : ou l'impunité ou l'application de peines autrement sévères que
celles qu'édicte notre projet. Enfin la diffamation : le droit commun laisse
absolument impunies la diffamation et l'injure publique. Si vous estimez
que la diffamation et l'injure publique doivent être réprimées et que les
simples citoyens doivent être protégés dans leur honneur, contre les intempérances de la parole ou de la presse, il faut alors, messieurs, adopter ou
les dispositions de notre proposition de loi, ou des dispositions similaires.
Si vous ne le faites pas, voici quels seront encore les résultats : l'impunité
pour la parole, l'impunité pour la presse ».
Ainsi Agniel, à l'appui d'exemples précis, expose-t-il tour à tour et de
façon répétitive quel serait le résultat fatal du contre-projet de son adversaire : sous prétexte de placer la presse sous l'empire du droit commun
pénal, il aboutirait « ou à l'impunité de la presse et de la parole, ou à une
condamnation exagérée parce que le Code pénal édicté contre quelquesunes des infractions de droit commun visées par le projet de loi prévoyait
des peines infiniment plus sévères que celles déterminées par ce projet ».
S'en suivent de très longs échanges entre les partisans d'une loi spéciale
et ceux du droit commun, dont le député Allain-Targé qui reproche à
Agniel d'avoir introduit des délits d'opinion dans son projet : « La loi qui
est présentée par la commission crée des délits d'opinion et elle relève des
délits qui, à l'heure qu'il est, sont impunis ; et de conclure : si votre loi est
appliquée, vous aurez l'air d'avoir fait une loi de réaction » ; et Émile de
Marcère d'affirmer : « nous sommes partisans du droit commun ; et nous
considérons que le droit commun est précisément la formule exacte, nécessaire de la liberté, et nous voulons introduire le droit commun dans la presse
précisément parce que nous sommes partisans de la liberté de la presse ».
Quant à Émile de Girardin, il ferme le banc en admettant que « La loi est
mauvaise, mais elle est meilleure que les lois qui l'ont précédée ! »
Pour finir, alors que le garde des Sceaux et les orateurs de la commission favorables à une loi spéciale demandaient le rejet pur et simple du
contre-projet de Floquet, la Chambre estime que, s'il était indispensable
de viser les délits que le code n'atteint pas, tels que la diffamation et
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