Hors Collection - Le droit français de la concurrence. 30 ans après l'ordonnance du 1er décembre 1986 - 2017-2018 - 238

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LE RôLE ACCRU ( ?) DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES

publiques », à quoi la loi du 8 février 1995 a ajouté, « notamment dans le
cadre de délégation de service public », en regroupant l'ensemble du contentieux qui en résulte dans les juridictions judiciaires. Au visa de la loi des
16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III, d'où le Conseil a tiré le
principe fondamental reconnu par les lois de la République de séparation
des pouvoirs, le Tribunal des conflits a cependant introduit d'importantes
dérogations à cette règle générale, par une série de décisions concernant
des pratiques mises en œuvre par des personnes assurant des missions de
service public au moyen de prérogatives de puissance publique. Il a jugé
qu'en pareil cas, seule la juridiction administrative est compétente pour
apprécier la légalité des actes et décisions de ces entreprises et statuer sur la
mise en jeu de la responsabilité encourue55. Est ainsi soustraite au pouvoir
de sanction de l'autorité de la concurrence, et par voie de conséquence à la
juridiction de la Cour d'appel de Paris, une grande partie de l'activité des
entreprises du secteur public. Ce qui est contraire à l'exigence de neutralité
qui garantit l'égalité des conditions de concurrence entre les entreprises
privées et les entreprises publiques56.

B. L'intégration du droit de la concurrence
dans le bloc de la légalité administrative
31. Dans un premier temps, à partir de 1993, le Conseil d'État avait
estimé que les dispositions de l'ordonnance de 1986 étaient inapplicables
aux actes de dévolution du service public57. Il est revenu sur cette position
par une décision de 199758par laquelle il a jugé que « les actes de dévolution
des services publics peuvent être contestés sur le fondement des articles 7,
8, 9 et 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986. » À partir de là, il a développé une jurisprudence intégrant le droit de la concurrence dans le bloc
de légalité des actes de l'administration59. Il existe donc désormais un droit
spécifique de la concurrence appliqué aux interventions des opérateurs
publics et des autorités, réglementaires sur les marchés, en marge du même
55. TC, 6 juin 1989, Préfet de la région Île-de-France c/ Cour d'appel de Paris (affaire
dite « Ville de Pamiers »), n° 02578 ; TC, 4 nov. 1996, Société Datasport c/ Ligue nationale
de football, n° 03038 ; TC, 18 oct. 1999, Aéroports de Paris et Air France c/ TAT European,
n° 03174.
56. OCDE, Garantir l'égalité des conditions de concurrence entre les entreprises publiques
et les entreprises privées à l'appui de la croissance et du développement, 2013, https ://www.
oecd.org/fr/rcm/C-MIN(2013)18-FRE.pdf
57. CE, 23 juill. 1993, Compagnie générale des eaux, n° 138504.
58. CE, 3 nov. 1997, Million et Marais, n° 169907.
59. J.-M. Sauvé, « À quoi sert la concurrence ? », Allocution d'ouverture du colloque
organisé par la revue Concurrences à l'Assemblée nationale le 4 décembre 2014 http://www.
conseil-etat.fr/Actualites/Discours-Interventions/A-quoi-sert-la-concurrence.

http://www http://www.conseil-etat.fr/Actualites/Discours-Interventions/A-quoi-sert-la-concurrence

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