Bibliothèque de droit social - Les relations de travail dans l'entreprise transnationale 2017-2018 - 305

LA TRANSITION VERS UN NOUVEAU PARADIGME DE L'ENTREPRISE

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Cette approche introduit donc une dimension que n'ont pas les autres théories : l'ouverture sur l'environnement et la mise en interaction du système avec les
éléments qui l'entourent. Elle se détache donc des seules relations entre les sociétés
du groupe ou du réseau. À ce titre, elle est sans doute la plus « aboutie » pour appréhender la complexité de l'entreprise transnationale. Cette ouverture sur l'environnement, qui constitue l'un des courants de l'approche systémique, est à la fois intégrée
et dépassée par l'analyse autopoïétique développée par G. Teubner.
347. L'approche autopoïétique de l'entreprise. Dans son ouvrage consacré à
l'analyse autopoïétique du droit, le Professeur Teubner analyse le groupe de
sociétés, souvent confondu par l'auteur avec le « groupe d'entreprises », à partir
de la définition du système autopoïétique. Issu des sciences dures, de la biologie
et de la cybernétique en particulier, un système autopoïétique s'entend d'un
système construit autour d'un processus de production des composants lesquels, de manière cyclique et du fait de leurs perpétuelles interactions et transformations, renouvellent en permanence ce processus de production de composants. C'est en d'autres termes un système qui produit et reproduit l'ensemble de
ses éléments constitutifs.
Classiquement, la théorie des systèmes envisage le système, soit comme un
espace opérationnellement clos qui ne permet pas d'expliquer les interférences et
modifications en provenance de l'extérieur soit, comme nous l'avons vu, comme
un espace ouvert sur son environnement et donc contraint par celui-ci. La thèse,
développée par le Professeur Teubner, qui envisage le droit comme un système
autopoïétique, permet au contraire de dépasser ce clivage en considérant que le
système est autonome, mais en relation avec son environnement91. Le système doit
être clos pour être ouvert sur l'extérieur92.
L'auteur rattache le groupe à l'autopoïèse et le définit comme « un réseau
hiérarchiquement organisé de sociétés semi-autonomes »93. Le groupe serait ainsi
une société de degré supérieur qui coordonnerait plusieurs « centres d'actions
autonomes »94 qui pourraient être tenues pour responsables. Il en résulterait,
selon l'auteur, une imputation multiple qui prendrait trois formes différentes :
une forme cumulative, une forme alternative et une forme complémentaire où
l'imputation des différentes sociétés du groupe ne se conçoit qu'en considération
du groupe pris dans son ensemble95. L'imputation varierait ainsi selon des considérations opportunistes. Les unités composant le groupe seraient alors dotées
d'une telle autonomie qu'on pourrait leur imputer tel ou tel fait. Mais, leur autonomie s'opposerait alors à l'unité du tout.
Cette notion d'autonomie, qui constitue l'une des dimensions essentielles de
la théorie autopoïétique, pose de manière générale des difficultés lors de son
application au groupe ou à l'entreprise96. En effet, dans le versant classique de la
91. G. Teubner, Le droit, un système autopoïétique, préc. V. sur la pensée de l'auteur relative au
pluralisme juridique, infra, n° 549 et 552.
92. Le raisonnement semble logique ; il suffira pour s'en convaincre d'analyser le fonctionnement
d'une cellule dans un organisme vivant.
93. G. Teubner, Le droit, un système autopoïétique, préc., p. 229.
94. Ibid.
95. Préc., p. 230.
96. Le critère de l'autonomie, présent également dans la théorie institutionnelle, empêche de la
même manière de considérer l'entreprise comme une institution.

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