Systèmes - Dynamiques du droit de l'urbanisme - 1re - 30

Dynamiques du droit de l'urbanisme

de l'urgence. La ville se concentre et s'étend sans plan, sans parti
d'aménagement : le fait s'impose au droit, il le devance.
Le droit lui-même reste balbutiant.
L'expropriation pour cause d'utilité publique, réformée par une loi du
7 juillet 1833, demeure une procédure exceptionnelle, lourde et chère. La
loi du 3 mars 1841 va jusqu'à la subordonner à une loi décidant de grands
travaux15. Son champ d'application est, de plus, circonscrit aux travaux
d'utilité publique tels qu'ils sont définis à l'article 3 de la loi, visant les
infrastructures, notamment de transport, plutôt que les besoins liés à la
rénovation ou à l'extension des villes16.
Apparaissent cependant des concepts nouveaux, qui préfigurent des
pans du futur droit de l'urbanisme.
La loi du 13 avril 1850 sur les logements insalubres permet, « dans
toutes les communes où le conseil municipal l'aura déclaré nécessaire »,
de nommer une commission chargée « de rechercher et d'indiquer les
mesures indispensables d'assainissement des logements et dépendances
insalubres mis en location ou occupés par d'autres que le propriétaire,
l'usufruitier ou l'usager », commission comportant un architecte et un
médecin. Il en résulte l'obligation de prendre certaines mesures, qui
pèsent sur le propriétaire ou la commune, selon les causes d'insalubrité,
et ouvre à la commune, sous certaines conditions, la possibilité d'acquérir
les propriétés comprises dans le périmètre des travaux.
On peut y voir un procédé d'urbanisme opérationnel, qui permet de
contourner les limites et les contraintes du droit de l'expropriation. On
comprend pourquoi cette loi, votée à l'initiative des frères Melun, s'est
heurtée aux idées libérales de l'époque, imprégnées d'une certaine
conception des droits de l'homme et du citoyen, au rang desquels figurent
la liberté (dont celle de mal se loger) et le droit de propriété. Henri de
Riancey, rapporteur de la proposition de loi à l'Assemblée législative,
l'exprime ainsi : « La matière est délicate... le libre usage, la libre
disposition de la chose qui appartient à un citoyen commandant le respect
le plus sévère, car ce sont les premières assises de l'ordre social... On peut y
opposer toutefois l'incontestable doctrine que le droit et l'intérêt privé
doivent céder à l'intérêt public ».
La loi est relayée par le discret décret-loi du 26 mars 1852 relatif aux
rues de Paris.
15. L'article 545 du Code civil dispose que « Les grands travaux sont ordonnés par le pouvoir
législatif utilité publique déclarée par le pouvoir administratif les tribunaux judiciaires
après avoir vérifié si les formalités réglementaires ont été remplies ordonnent
expropriation des biens indemnité est fixée par un jury spécial ».
16. On perçoit ainsi, mais sous un autre angle, l'attrait pour les « beaux percés », vastes
saignées dans le tissu urbain existant qui permettent de rattacher à la création de voies
nouvelles la restructuration de vastes ensembles urbain, le tout sous couvert de « travaux
d'utilité publique ».

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