Contextes - Penser l'ancien droit privé - 147

PENSER L'ANCIEN DROIT DES CONTRATS

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tion la fonction de critère de délimitation d'une branche du droit (puisque
c'est seulement « de ces sortes d'obligations » qui correspondent à cette
définition « dont il s'agit dans ce traité », explique Pothier ; et, à ses yeux, les
quatre parties qui forment l'armature de son traité sont celles qui épuisent
toutes les questions relatives à cette branche du droit). Outre les traités
consacrés aux contrats ou aux obligations, il est tentant de déceler dans
des ouvrages plus généraux qui, à l'instar des Institutions au droit françois
de Guy Coquille, renferment des subdivisions (quelle que soit leur forme :
chapitre, titre, etc.) exclusivement dédiées aux contrats (dans les Institutions
de Guy Coquille : Des contrats et convenances), l'idée qu'il y a là un objet
particulier - une matière - dont la particularité justifie que toutes les règles
qui s'y rapportent soient traitées dans une même subdivision de l'ouvrage.
Dans l'Institution au droit françois de Gabriel Argou17, c'est la présence
d'un livre entier (le troisième sur les quatre que comporte l'ouvrage), intitulé Des obligations, qui traduit l'existence de cette branche du droit comme
une branche spéciale (mais le gage et les effets des obligations - extinction,
contrainte par corps, etc. - sont abordés dans le quatrième livre).
Une telle particularisation est néanmoins assez souvent absente des
ouvrages. Dans les Arrêtés de Lamoignon, censés pourtant être « l'ouvrage le
plus propre à former cette étendue et cette supériorité d'esprit, avec laquelle
on doit embrasser le Droit Français »18, les seuls contrats envisagés sont la
communauté entre époux, les donations entre époux et les donations entre
vifs. Sont aussi exposées certaines règles relatives aux effets (hypothèque) ou
à l'exécution du contrat, comme le paiement, le répit et la cession de biens ou
encore à la compensation ; en revanche, aucune mention de règles relatives
à la formation des contrats en général. Faut-il en déduire que ni le régime
des contrats ordinaires (comme la vente) ni, a fortiori, un droit commun
des contrats ne regardent le droit français ? Autre exemple : chez Bourjon,
le droit des contrats n'apparaît pas en lui-même et pour lui-même. Ne sont
envisagés que différents contrats, certains (comme le contrat de vente) étant
scindés en autant de types différents qu'ils portent sur un objet particulier (meuble/immeuble/chose incorporelle). Et ces différents contrats sont
passés en revue, avec leur régime propre (donc sans aucune tentative de faire
émerger un droit commun des contrats), dans un livre (le troisième, intitulé
sur leur objet (personnes, choses, actions) et forment autant de « matières » (éd. 1761, intr.
gén., n° 54), parmi lesquelles figure la « matière des obligations, d'où naît le droit à la chose »
et dont l'étendue, précise-t-il, « exige un traité particulier » (éd. 1761, intr. gén., n° 109). Sur
ce commentaire, cf. D. Deroussin, « Pothier, la coutume (d'Orléans) et le droit coutumier »,
G. Cazals et Fl. Garnier (dir.), Les décisionnaires et la coutume : contribution à la fabrique
de la norme, PU Toulouse 1, 2017, p. 413 et sv.
17. Éd. 1694, vol. 2.
18. Tel aurait été le jugement de Daguesseau, d'après l'Avertissement à l'édition de 1777,
p. vii.

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