Contextes - Penser l'ancien droit privé - 191

ABSTRACTION ET ANACHRONISME

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Dans ce fragment, il est question de la novation effectuée par l'esclave.
Gaius a relaté, sans soulever d'objections, la position de Julien. Ce dernier
a admis que la stipulation novatoire de l'esclave éteignait la stipulation novée
si le créancier pouvait agir par le biais de l'actio de peculio. Il s'agit certes
d'une extinction qui trouve son origine dans le droit prétorien, et plus précisément dans l'exception de pacte qui est opposée par Titius - le premier
débiteur - au créancier. Il n'est dès lors pas question d'une extinction iure
civili. Néanmoins, ce texte reste très significatif car il révèle que le cas de
la stipulation novatoire de l'esclave ne pouvait se résumer toujours à une
simple inefficacité totale, assimilable à l'hypothèse contemporaine de la
nullité absolue. La démarche des juristes romains était souple et adaptée
au cas concret.
Au vu des textes examinés, il semble préférable de considérer que les
juristes romains ne décidaient pas des effets des différents cas de stipulations
invalides en les enfermant dans des catégories dogmatiques distinctes comme
la nullité et l'inutilité106. Dans le cas d'un acte juridique affecté par un vice,
ils déterminaient alors de manière casuistique si des effets en découlaient.
Il semble impossible de distinguer dogmatiquement, sur la base de l'emploi
des termes nullus et inutilis, entre deux catégories distinctes, la nullité et
l'inefficacité.
Cette approche casuistique de la jurisprudence romaine peut difficilement être reproduite dans son entièreté par le romaniste. Celui-ci doit avoir
recours à une interprétation plus systématique, ne serait-ce que par un souci
de meilleure accessibilité de son ouvrage. Dans l'impossibilité d'interpréter
Homère par Homère, il est nécessaire de choisir des catégories dogmatiques,
même si ces dernières ne sont pas entièrement satisfaisantes. Un tel choix
ne peut pas être effectué de manière abstraite, ainsi que le soutenait Vittorio
Scialoja, un des pères de la romanistique, qui exprimait la méthodologie
de son époque107. Un tel choix, aussi imparfait soit-il, ne peut que se faire
après une analyse des sources.
le pécule est donnée contre le maître de cet esclave, à savoir si l'esclave a eu une juste cause
pour s'interposer, par exemple il devait à Titius la même somme d'argent. En revanche
s'il est intervenu comme s'il était un fidéjusseur, pour une telle raison une action dans les
limites du pécule n'est pas donnée et il ne faut pas empêcher au créancier de demander la
somme d'argent à Titius. Également, il ne faut d'aucune manière empêcher au créancier
d'agir [scil. contre Titius] s'il avait cru que l'esclave était libre. »
106. S. Di Paola, Contributi..., op. cit., p. 33 expliquait la différence entre 3.119 et 3.176
en supposant, en analogie avec la fideiussio, que la sponsio et la fidepromissio pouvaient
accéder aux obligations de l'esclave et du pérégrin car dans ces hypothèses il serait possible
de prendre en compte les obligations naturelles. La teneur des deux passages des Institutes
est toutefois trop proche pour que l'on puisse supposer que dans Gaius 3.119 il soit question
d'obligations naturelles alors que ce n'était pas le cas dans le paragraphe 3.176.
107. V. Scialoja, Negozi giuridici (corso di diritto romano nella Regia Università di Roma
nell'anno accademico 1892-1893 raccolto dai dottori Mapei e Nannini), 4e éd., Roma, Il foro

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