Contextes - Penser l'ancien droit privé - 212

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CONTRATS ET PROPRIÉTÉ

à une notion exclusivement procédurale49, soit encore à un mécanisme plus
substantiel rassemblant différentes prérogatives portant sur une chose50.
Les canonistes, romanistes et feudistes médiévaux divisent en outre le
concept de dominium en trois espèces distinctes : le dominium directum, le
dominium utile et le quasi dominium51. Considérant le dominium comme
la seule cause de l'action en revendication, la doctrine médiévale soutient
à partir de la fin du xiie siècle que tous ceux qui bénéficient d'une telle
action - qu'ils soient ou non qualifiés de dominus - sont nécessairement
titulaires d'une forme de dominium. Suivant cette analyse, celui auquel le
droit romain attribue la qualité de dominus et l'action en revendication
dite « directe » est alors titulaire du dominium directum. L'emphytéote,
le superficiaire ou encore le preneur d'un fonds municipal qui bénéficient
d'une action réelle utile suivant le droit de Justinien sont quant à eux
titulaires d'un dominium utile. Le possesseur de bonne foi qui dispose
de l'action publicienne52 est enfin titulaire d'un quasi dominium. Une
même chose est ainsi susceptible d'être l'objet d'un dominium directum
et d'un dominium utile ou d'un quasi dominium. Les juristes médiévaux
49. Il s'agit de la thèse développée par Maximiliane Kiriechbaum, qui peine toutefois
à convaincre dès lors qu'il est question des juristes du xive siècle : M. Kriechbaum, Actio,
ius und dominium..., op. cit., p. 375 et s.
50. R. Feenstra, « Dominium utile est chimæra... », loc. cit., p. 381-397.
51. Sur la distinction médiévale entre dominium directum et dominium utile, que l'historiographie désigne par l'expression « théorie du double domaine » ou « théorie du domaine
divisé », voir parmi bien d'autres : E. Meynial, « Notes sur la formation de la théorie du
domaine divisé (domaine direct et domaine utile) du xiie au xive siècle dans les romanistes.
Étude de dogmatique juridique », Mélanges Fitting, Montpellier, 1908, réimpr. anast., Aalen
- Frankfurt-am-Main, Scientia Verlag, 1969, t. II, p. 409-461 ; R. Feenstra, « Dominium
utile est chimæra... », loc. cit., p. 381-397 ; R. Feenstra, « Les origines du dominium utile
chez les Glossateurs (avec un appendice concernant l'opinion des Ultramontani) », Flores
legum H. J. Scheltema, Antecessori Groningano, oblati, éd. R. Feenstra, J. H. A. Lokin et
N. Van der Wal, Gröningen, Wolters - Noordhoff, 1971, p. 49-93 ; réimpr. in : Id., Fata
iuris romani. Études d'histoire du droit, Leyde, Presses universitaires de Leyde, 1974,
p. 215-259 ; M. Kriechbaum, Actio, ius und dominium..., op. cit. ; sur le quasi dominium,
voir : R. Feenstra, « Action publicienne et preuve de la propriété, principalement d'après
quelques romanistes du Moyen Âge », in : Mélanges Philippe Meylan : recueil de travaux
publiés à l'occasion de son soixante dixième anniversaire, t. II, Droit romain, Lausanne,
Imprimerie centrale de Lausanne, 1963, p. 91-110 ; réimpr. in : Id., Fata iuris romani. Études
d'histoire du droit, Leyde, Presses universitaires de Leyde, 1974, p. 119-138 ; voir surtout
les nombreux articles consacrés à cette question dans le recueil de Paolo Grossi : P. Grossi,
Il dominio e le cose..., op. cit.
52. L'action publicienne est une action fictice par laquelle le possesseur revendique la
chose comme s'il en était le véritable maître. Contrairement à l'action réelle utile, la publicienne est inopposable au dominus ; sur l'action fictice en droit romain, voir : R. Monier,
Manuel élémentaire de droit romain, Paris, Domat - Montchrétien, 1947, t. I, p. 181-182 ;
sur l'action publicienne en droit romano-canonique, voir : R. Feenstra, « Action publicienne
et preuve de la propriété, principalement d'après quelques romanistes du Moyen Âge »,
loc. cit., p. 91 et s. [p. 119 et s.].
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