Systèmes - La conduite du changement climatique : entre contraintes et incitations - 1re - 48

La conduite du changement climatique

non soumis au marché européen des permis de CO24. Lors de son
discours d'Artemare, le 10 septembre 2009, le président de la
République avait défini, autour de quatre grands principes, les
contours de la taxe carbone5. Le gouvernement, avec une grande
prudence, avait donc proposé d'introduire la taxe carbone dans le
projet de loi de finances pour 2010, à un taux modéré, moitié plus
faible que les recommandations du rapport Rocard, au motif que ce
prix « correspond à l'ordre de grandeur des prix sur le marché
européen du carbone »6. Dans le souci d'assurer son acceptabilité, le
législateur fiscal a dû composer avec certains groupes de pression
qui ont défendu ardemment leurs consommations d'énergie7, ce qui
s'est traduit par de nombreuses exonérations, réductions,
remboursements partiels et taux spécifiques8. Saisi de la loi de
finances pour 2010 par l'opposition parlementaire9, le Conseil
constitutionnel, dans sa décision du 29 décembre 2009, a estimé
que les nombreux régimes d'exemption institués par le législateur
fiscal étaient contraires à l'objectif de lutte contre le réchauffement
climatique et créaient une rupture caractérisée de l'égalité devant
les charges publiques10. Il a, par voie de conséquence, censuré
l'ensemble du régime relatif à la contribution carbone. Dans un
premier temps, un nouveau dispositif, censé entrer en vigueur au

4. ROCARD M., Rapport de la conférence des experts et la table ronde sur la contribution climaténergie, 28 juill. 2009, 84 p.
5. Discours de M. le président de la République sur la stratégie de la France dans la lutte
contre le réchauffement climatique, Artemare (Ain), 10 sept. 2009.
6. Cf. exposé des motifs de l'art. 7 du projet de loi de finances pour 2010, 18 déc. 2009, Sénat,
Doc. parl., nº 34.
7. Cf. article paru dans Libération du 28 juill. 2009, intitulé « Des lobbys chargent la taxe
carbone ».
8. Cf. art. 7 et 10 du projet de loi de finances pour 2010, 18 déc. 2009, Sénat, Doc. parl., nº 34.
Au regard de l'importance des régimes d'exception certains parlementaires, et notamment
le président de la commission des finances du Sénat, craignaient qu'ils soient source de
complexité et d'arbitraire et comparaient ce dispositif à un véritable « gruyère fiscal » ; le
ministre des Finances regrettant lui-même que la contribution carbone « soit émaillée d'un
certain nombre d'accrocs ou de petits trous de dentelle ». Voir compte rendu des débats,
Sénat, 23 nov. 2009, séance nº 33.
9. Et notamment sur le dispositif de redistribution de la contribution carbone (article 9 de la
loi de finances) comme constituant une rupture caractérisée du principe d'égalité des
citoyens devant les charges publiques. Cf. saisine par 60 députés et par 60 sénateurs sur
le projet de loi de finances pour 2010.
10. Voir Cons. const., déc. nº 2009-599 DC du 29 déc. 2009 sur la loi de finances pour 2010,
cons. 82. Voir MASTOR W., « La contribution carbone à la lumière de la décision du Conseil
constitutionnel du 29 déc. 2009 : chronique d'une mort - et d'une renaissance ? -
annoncées », AJDA 2010, p. 277 - BARILARI A., « La contribution carbone et le Conseil
constitutionnel : une censure annoncée ? », JCP G, 18 janv. 2010, p. 61. Voir également
KELLER F., « Taxe carbone : la décision du conseil constitutionnel est un progrès
écologique », Le Monde, 1er janv. 2010.

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