Hors collection - La Constitution de la Ve République - 421

PASCAL JAN

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sa compétence est circonscrite à leur activité privée21. Il se garde de toute appréciation sur l'opportunité de ses décisions politiques pour se limiter à la régularité
externe des actes litigieux. Afin de ne pas entrer plus avant dans l'activité interne
d'un parti et de respecter le principe de liberté qui anime son activité, le juge judiciaire comme le juge administratif se gardent également de livrer un critère positif
pour définir les partis politiques. Le Conseil d'État se contente de se référer à la
nécessité d'un agrément délivré par la Commission nationale des comptes de campagne22 ; la Cour de cassation applique le droit commun des associations et définit
négativement un parti en considérant qu'une formation politique ne participe pas
à l'exercice d'une mission de service public23. Il n'empêche, la judiciarisation de la
vie interne des formations politiques atteste non seulement de rapports tumultueux en leur sein mais encore d'une volonté affirmée par les militants ou responsables politiques minoritaires, voire les salariés, de défendre leurs opinions et leurs
droits par le truchement de la contestation de l'application des règles statutaires ou
des règles relevant du droit disciplinaire commun.
L'intrusion des juges dans le fonctionnement des partis politiques est une réalité. Il ne faut toutefois pas l'exagérer. Les buts de l'activité d'un parti échappent
ainsi aux juges sauf lorsqu'ils contreviennent à l'article L. 212-2 du Code de la
sécurité intérieur qui prohibe les activités illégales comme l'appel à la violence, à
la haine, ou à la discrimination « envers une personne ou un groupe de personnes
à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à
une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (...) ». Les tribunaux
ne soumettent pas davantage les partis aux règles applicables aux affaires (droit
des marques et concurrence déloyale). La cour d'appel de Paris a, dans un arrêt du
24 septembre 2015, débouté la demande de la Fédération des élus socialistes et
républicains qui contestait l'appropriation du nom « Les républicains » par un
parti politique. De même, les partis jouissent d'une quasi totale liberté d'action
qui s'appuie sur l'article 4 de la Constitution et qui bénéficie d'une garantie renforcée par le juge européen des droits de l'homme. Enfin, le juge de l'élection
refuse son instrumentalisation par ceux qui entendent le faire juge des investitures, sauf manœuvres frauduleuses établies. Le juge administratif des référés
décline d'ailleurs sa compétence pour juger de telles décisions. Elles ne sont pas
détachables du contentieux des opérations électorales24. Il ne faut pas sous-estimer, cela étant, la tendance à vouloir, pour certains, banaliser le contrôle judiciaire des règles statutaires ou des décisions internes (adhésion refusée, exclusion,
investitures...). Elle traduit une réelle fragilité des partis incapables de traiter « en
interne » des conflits avant tout politiques qui prennent une coloration judiciaire
pour les besoins de la cause. Prendre à témoin l'opinion publique et plus encore
les électeurs participe en effet d'une stratégie politique davantage que d'une réelle
volonté d'investir le terrain judiciaire sur le fond.
21. CA Versailles, 9 févr. 2018, Front national, à propos de la récusation de l'un de ses
membres.
22. CE, 30 oct. 1996 ; Élections municipales de Fos-sur-mer.
23. Cass. 1re civ., 25 janv. 2017, n° 15-25561, Front national c/ J-M. L.
24. CE, 2 juin 2017, n° 411015.

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