Hors collection - La Constitution de la Ve République - 67

AUDREY DE MONTIS

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leur choix à l'ordre du jour de contrôle25 ; ils peuvent obtenir, de droit, une fois
par session ordinaire la création d'une commission d'enquête ou d'une mission
d'information26. Ils disposent également de plusieurs séances d'initiative parlementaire par année au sein desquelles ils sont libres de proposer des sujets d'initiative ou de contrôle en vertu de l'article 48, alinéa 5 C. Grâce à cette protection
constitutionnelle, les groupes d'opposition et minoritaires consolident leur place
au sein du Parlement. La fonction de contrôle s'est en outre développée : les outils
se sont diversifiés et du temps de séance supplémentaire y a été consacré, dans les
deux assemblées27. Dès lors, il semblerait que la France intègre cette nouvelle
division entre la fonction gouvernementale et la fonction de contrôle.
Cependant, la mise en œuvre de ces dispositifs repose encore trop essentiellement entre les mains de la majorité. Si cette dernière n'a pas envie d'offrir de la
contradiction à l'opposition dans le cadre de l'ordre du jour réservé, elle peut
facilement, grâce au cumul de certains outils28 en affecter l'organisation. De
même, il a pu arriver qu'elle réduise l'intérêt du droit de tirage effectif pour créer
des commissions d'enquête29. En conséquence, l'opposition parlementaire ne
peut pas encore à ce jour, faire réellement contrepoids au couple gouvernement/
majorité parlementaire. La division fonctionnelle souhaitée entre la faculté de
statuer et celle de gouverner n'est pas encore réellement mise en œuvre. La fonction de contrôle demeure toujours la fonction « pauvre » du Parlement français
alors qu'il devrait s'agir de sa « seconde nature »30.
En conclusion, une nouvelle articulation fondée autour des notions de majorité et d'opposition progresse, mais elle doit être consolidée. Parce qu'il s'agit
encore de raisonner pour l'heure en termes d'équilibre institutionnel entre les
organes exécutif et législatif, un tempérament à la prééminence du premier pourrait-il être incarné par le Sénat ?

B. L'affermissement contrôlé du rôle du Sénat
La seconde chambre cultive depuis toujours un lien spécifique avec le gouvernement. Elle n'est pas « en mesure de tenir en échec »31 la volonté de ce dernier
25. Art. 48, al. 8 RAN.
26. Art. 141, al. 2 RAN et 145, al. 5 RAN. Au Sénat, ce droit est offert à chaque président
de groupe (art. 6 bis RS).
27. Voir A. de Montis, La rénovation de la séance du Parlement français. Étude sur
l'efficacité politique de la réforme constitutionnelle du 23 juill. 2008, Paris, Dalloz,
coll. Bibliothèque parlementaire et constitutionnelle, 2016, p. 287-346.
28. Le cumul du « vote bloqué » et du « vote solennel » permet de regrouper tous les votes
à la fin de l'examen du texte et de les programmer à une date déterminée (ibid., p. 334-339).
29. À quelques reprises, la majorité a adopté des amendements en commission pour
modifier l'objet de la proposition de résolution, ce qui dénaturait, in fine, le droit de tirage :
ibid., p. 314-316.
30. C. Poncelet, cité par J. Gicquel, J.-É. Gicquel, Droit constitutionnel et institutions
politiques, 31e éd., Paris, LGDJ, coll. Domat droit public, 2017, p. 780.
31. J. Roche, « Le Sénat de la République dans la Constitution de 1958 », RDP 1959,
p. 1186.
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