Bibliothèque de droit public - Tome 302 - Les interventions des tiers porteurs d'intérêts collectifs dans les contentieux constitutionnels incidents français et italien - 69

LE DÉBAT CONTRADICTOIRE DANS LE CONTENTIEUX CONSTITUTIONNEL INCIDENT

également utilisée, cela peut en revanche apparaître plus surprenant, dans le
cadre d'un contrôle a posteriori par voie incidente22.
132. La question qui se pose est alors celle de savoir si on peut parler de
« parties » dans le cadre d'un procès destiné à vérifier la constitutionnalité de la
loi. S'agissant particulièrement du contrôle par voie incidente, il convient alors de
déterminer si cette qualification vise seulement les parties au procès a quo prenant
part à la procédure devant le juge constitutionnel ou si elle peut également être
attribuée à la « partie publique » y participant23.
B. LA DIFFICILE TRANSPOSITION DE LA NOTION DE PARTIE
DANS LE CONTENTIEUX CONSTITUTIONNEL INCIDENT
133. (Les différentes notions de « partie au procès »). Pour appréhender l'organisation du contentieux constitutionnel et vérifier si celui-ci implique des parties, il faut d'abord préciser ce que l'on doit entendre par partie. D'après le
Vocabulaire juridique, dirigé par Cornu, la partie au procès est la « personne physique ou morale engagée dans un procès », c'est-à-dire « toute personne qui est
dans l'instance soit comme demandeur [...], soit comme défendeur, soit comme
intervenant »24. Si cette définition tient exclusivement à l'acception strictement
procédurale du terme, la doctrine italienne distingue traditionnellement d'autres
acceptions du concept de partie processuelle25. D'après l'Encyclopédie du droit,
dirigée par Mortati et Santoro-Passarelli, on peut appréhender la notion de « partie au procès » de trois manières. D'abord, dans une première acception, les parties, que l'on pourrait qualifier de « formelles », sont toutes les personnes habilitées
à réaliser des actes procéduraux. Ensuite, dans une deuxième acception, les parties sont, au sens procédural, celles qui subiront les effets du procès. Enfin, dans
une troisième acception, les parties au sens substantiel sont les personnes qui,
abstraction faite de leur participation à la procédure, subiront, au sens substantiel, les effets de la décision de justice26.
134. (Les parties au sens formel du terme). En ce qui concerne les parties au
sens formel du terme, leur identification dans le contentieux incident s'avère difficile
en raison de deux circonstances produites par les règles de la procédure, aussi bien
dans le système italien que dans l'actuel système français de la QPC. D'une part, il
n'y a pas de « parties nécessaires » mais seulement des « parties éventuelles »27, les
22. En réalité, déjà eu égard au contrôle préventif du système français, dans lequel l'identification de « parties » apparaît d'autant plus problématique qu'il y avait pas de parties privées touchées
dans leurs sphères juridiques au cours d'un litige, on avait pu soutenir de manière efficace que les
institutions prenant part à la procédure devant le Conseil constitutionnel pouvaient être qualifiées de
« parties » - bien que sui generis et avec une marge de manœuvre limitée - en raison de leur but spécifique poursuivi à travers la participation à la procédure : voir supra note 9 dans ce chapitre.
23. Ou encore, si elle peut viser aussi, comme certains auteurs le suggèrent, le juge qui a renvoyé
la question, qui serait ainsi le « requérant » de la procédure de contrôle de constitutionnalité. Voir en
ce sens M. Cappelletti, La giurisdizione costituzionale delle libertà, op. cit., p. 148.
24. G. Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, VIIe éd., PUF, Paris, 2005, p. 651.
25. Même si aujourd'hui la doctrine relève un certain manque d'intérêt pour une telle distinction : voir les références indiquées par M. D'Amico, Parti e processo nella giustizia costituzionale,
op. cit., p. 29 sqq.
26. A. Proto-Pisani, « Parte nel processo (diritto processuale civile) », in C. Mortati,
F. Santoro-Passarelli (dir.), Enciclopedia del diritto, Giuffré, Milan, 1981, p. 917 sqq., spéc. 921-922.
27. G. Zagrebelsky, La giustizia costituzionale, op. cit., p. 227 et G. Zagrebelsky, V. Marcenò,
Giustizia costituzionale, op. cit., p. 314.

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