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biens139
; de l'autre côté, la liberté d'expression artistique
de l'auteur de l'œuvre seconde. Plus précisément, le droit
d'auteur ne peut l'emporter qu'à la condition que son
application ne conduise pas à une atteinte disproportionnée
à la liberté d'expression. Le recours à cette méthode,
qui provient en réalité de la Cour européenne des droits
de l'homme140
critiques141
, n'a pas manqué de susciter d'importantes
. S'il apparaît parfaitement normal que, comme
d'autres droits fondamentaux, le droit d'auteur puisse parfois
plier face à la liberté d'expression, on rappellera que
le droit de la propriété littéraire et artistique procède déjà à
une balance des intérêts en interne, grâce notamment aux
exceptions qui sont apportées au monopole intellectuel,
à la règle fondamentale selon laquelle il ne protège pas
les idées, aux dispositions du Code de la propriété intellectuelle
relatives à l'abus de droit ou encore à la notion
de domaine public, autant d'éléments qui permettent de
préserver la liberté d'expression. La jurisprudence Klasen
présente aussi le défaut de générer une très forte casuistique,
puisque ce n'est qu'au regard des circonstances de
chaque espèce que l'on saura qui, du droit d'auteur ou
de la liberté d'expression, doit in fine l'emporter et selon
quelles modalités (par exemple, maintien ou allègement
des sanctions attachées normalement au droit d'auteur
si ce dernier est jugé applicable ?). La solution risque
par là même de conduire à des jugements en équité. Elle
est, en outre, contraire à la lettre de la loi car, si l'article
L. 113-4 du Code de la propriété intellectuelle énonce
que « [l]'œuvre composite est la propriété de l'auteur qui
139. V. not. les sources recensées supra, n° 465, note 4.
140. V. not. CEDH, 10 janv. 2013, n° 36769/08, Ashby Donald et autres c/
France, RIDA juill. 2013, n° 237, p. 323 et p. 237, obs. P. sirineLLi ;
Comm. com. électr. 2013, comm. 39, obs. C. Caron ; Légipresse
2013, n° 304, p. 221, note F. marChadier ; RTD com. 2013, p. 274,
obs. F. PoLLaud-duLian ; Propr. intell. 2013, n° 47, p. 216, obs.
J.-M. bruGuière ; RLDI avr. 2013, n° 92, 3052, p. 16, obs. L. Costes ;
GAPI, n° 5, note C. GeiGer : la Cour estime qu'une condamnation pour
contrefaçon du fait de la mise en ligne non autorisée de photographies
de défilés de mode ne constitue pas une ingérence disproportionnée
dans la liberté d'expression. Sur cet arrêt, v. aussi A. zoLLinGer, « Droit
d'auteur et liberté d'expression : le discours de la méthode », Comm.
com. électr. 2013, étude 8.
141. Sur lesquelles, v. not. T. azzi, « La balance des intérêts en droit de la propriété
littéraire et artistique », in V. barbé, C. GuiLLerminet et S. mauCLair
(dir.), La notion d'intérêt(s) en droit, Institut francophone pour la justice
et la démocratie, 2020, p. 191. Au-delà du droit d'auteur, v. not.
P.-Y. Gautier, « Contre la " balance des intérêts " : hiérarchie des droits
fondamentaux », D. 2015, p. 2189 ; F. Chénedé, « Contre-révolution
tranquille à la Cour de cassation ? », D. 2016, p. 796.
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l'a réalisée », c'est bien, rappelons-le, « sous réserve des
droits de l'auteur de l'œuvre préexistante ». Enfin, une
grande part du droit de la propriété littéraire et artistique (et
du droit en général) risque d'être déconstruite, car beaucoup
de procès peuvent se résumer à des conflits entre
droits fondamentaux, lesquels devraient en toute logique
être réglés eux aussi grâce à la balance des intérêts, avec
les mêmes conséquences. S'agissant des œuvres d'art,
on pense par exemple aux litiges de toutes sortes qui
sont susceptibles d'opposer le titulaire du droit d'auteur à
l'acquéreur du support de l'œuvre, chacun pouvant revendiquer
une protection au titre des droits fondamentaux,
l'un en tant que propriétaire d'un bien intellectuel, l'autre
en tant que propriétaire d'un bien matériel142
.
Ces arguments n'ont pas empêché la Cour de cassation
de reconduire la solution dans une affaire où il n'était
plus question d'œuvres graphiques et plastiques, mais
d'une nouvelle mise en scène du Dialogue des carmélites
considérée comme dénaturante par les ayants droit
de Georges Bernanos et de Francis Poulenc, qui invoquaient
dès lors une atteinte à leurs droits moraux143
.
Quelques mois après, dans l'affaire Klasen, la cour d'appel
de renvoi, tout en manifestant une évidente hostilité
à l'égard de la méthode préconisée par la haute juridiction144
.
En outre, comme on pou,
a finalement fait pencher la balance des intérêts
en faveur du photographe145
142. Cela ne signifie pas que le recours à la balance des intérêts doive toujours
être évité. Il serait de bonne méthode d'en limiter l'application aux
cas dans lesquels le droit positif ne fait prévaloir a priori aucun des droits
en conflit (v. par ex. supra, n° 585). Or tel n'est pas le cas en matière
d'œuvre composite, étant donné le principe posé par l'art. L. 113-4 CPI.
143. Cass. 1re
civ., 22 juin 2017, n° 15-28467 et 16-11759, Dialogue des
carmélites, D. 2017, p. 1955, note Ph. maLaurie ; Dalloz IP/IT 2017,
p. 536, obs. J. daLeau ; Comm. com. électr. 2017, comm. 69, note C.
Caron ; JCP G 2017, 890, note X. daverat ; RTD com. 2017, p. 891,
obs. F. PoLLaud-duLian ; Propr. intell. 2017, n° 65, p. 60, obs. A. LuCas ;
Légipresse 2017, p. 438, note E. trePPoz.
144. Les magistrats relèvent, en effet, qu'« il n'appartient pas au juge de
s'ériger en arbitre d'un droit qui mériterait plus protection qu'un autre ».
145. CA Versailles, 16 mars 2018, JCP G 2018, 513, note J.-M. bruGuière ;
Comm. com. électr. 2018, comm. 32, obs. C. Caron ; Légipresse 2018,
n° 361, p. 336, note V. varet ; Propr. intell. 2018, n° 68, p. 66, obs.
A. LuCas ; Dalloz IP/IT 2018, p. 300, note V.-L. benabou ; RTD com.
2018, p. 345, obs. F. PoLLaud-duLian ; RLDI avr. 2018, n° 147, 5193,
p. 11, note P. nouaL ; JCP E 2019, 1063, n° 10, obs. A. zoLLinGer ; RIDA
janv. 2019, n° 259, p. 169, obs. P. sirineLLi et A. bensamoun. Comp.
dans l'affaire du Dialogue des carmélites, CA Versailles, 30 nov. 2018,
Dalloz IP/IT 2019, p. 101, note P.-Y. Gautier ; Comm. com. électr. 2019,
chron. 6, n° 1, obs. X. daverat.
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