Bibliothèque de droit privé - Tome 590 - La religion du contractant - 83

LA CONTRACTUALISATION PAR INCORPORATION DES MOTIFS RELIGIEUX

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a) L'incorporation de la religion de l'enfant
96. État de la jurisprudence concernant le choix de la religion de l'enfant. Il
faudrait déjà, pour qu'un juge homologue une convention parentale relative à la
religion de l'enfant, que celle-ci ne soit pas contraire à son intérêt, ce qui pourrait
inclure sa liberté religieuse.
Plusieurs arrêts témoignent pourtant de l'inconstance de la jurisprudence de
la Cour de cassation au sujet de l'autonomie religieuse de l'enfant. Au cours des
années 1960, elle a, dans une première affaire, conféré un poids non négligeable à
la volonté d'une jeune fille de seize ans de se soustraire à l'emprise de ses parents,
un couple d'anciens catholiques convertis au protestantisme, particulièrement
autoritaire, pour le choix de sa confession40. Toutefois, la Première Chambre civile
de la Cour de cassation s'est prononcée, dans un arrêt en date du 11 juin 1991, sur
le cas d'une adolescente du même âge ayant reçu le sacrement du baptême, conformément à la volonté de ses parents, avant de faire part de sa volonté de devenir
Témoin de Jéhovah. Le père s'opposa fermement à sa conversion. La Cour de
cassation, loin de prendre parti, s'en tint à l'appréciation des juges du fond qui
avaient considéré que la jeune fille devrait attendre l'âge de la majorité41.
Plus que le fruit du hasard, la divergence des décisions pourrait trouver une
justification rationnelle, sachant que l'acte de conversion peut être jugé comme
une décision grave. Par ailleurs, l'article 371-1, dans sa version en vigueur du premier janvier  1971 au 5  mars 2002, disposait simplement que l'enfant devait
demeurer sous l'autorité de ses parents jusqu'à sa majorité ou son émancipation.
Ces derniers devaient veiller, quoi qu'il en soit, à ne pas détourner l'autorité
parentale de sa finalité en l'exerçant dans l'ignorance absolue de l'intérêt de l'enfant. C'est ainsi que pour tenir en échec, dans la première des deux affaires, la
volonté des parents, la Cour de cassation s'en est tenue à l'appréciation souveraine des juges du fond qui avaient relevé que « la jeune fille, lors de l'intervention
de ses parents visant à la soumettre à une contrainte d'ordre confessionnel, présentait encore un état d'angoisse et d'insécurité affective lié au comportement de ses
parents à son égard - et que toute tentative pour la contraindre, par quelque moyen
que ce soit à des actes de pratique religieuse, aurait, sur son développement psychique, les plus graves répercussions42 ». En l'absence de circonstances laissant
croire que l'enfant pourrait, du fait des orientations religieuses de ses parents,
encourir un quelconque danger, il lui est paru normal, dans la seconde espèce, de
ne pas contrarier leurs aspirations.
97. Une liberté évolutive, tributaire de la maturité de l'enfant mineur.  Toujours est-il qu'une telle position ne paraît plus fondée depuis l'entrée en vigueur
de la loi du 4 mars 200243 qui est venue préciser que « les parents associent l'enfant
aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité44 ». Or,
comme le faisait valoir la demanderesse au pourvoi ayant donné lieu à l'arrêt
précédemment évoqué, une personne âgée de plus de quinze ans et ne souffrant
40. Cass. 1re civ., 7 avril 1965 : Bull. civ. I, n° 258 ; D. 1965, juris., p. 704, note J. C. 
41. Cass. 1re civ., 11 juin 1991 : D. 1991, jurisp. p. 521, note Malaurie (P.) ; ibid. 1992, somm.
p. 65, note Descamps (N.).
42. Cass. 1re civ., 7 avril 1965, préc.
43. F.  Messner, P.-H. Prélot, J.-M.  Woehrling, Traité de droit français des religions, 2e  éd.,
LexisNexis, coll. Traités, 2013, p. 1026, n° 1637.
44. C. civ., art. 371-1.
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