Bibliothèque de droit social - Tome 76 - L'évaluation professionnelle des salariés - 50

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L'ÉVALUATION PROFESSIONNELLE DES SALARIÉS

44. La première fonction est une fonction d'affectation. Elle repose sur le
constat selon lequel « les hommes ont des ressources » et qu'il convient de rationaliser cette ressource39, de permettre l'adéquation entre d'une part la force de
travail des salariés, et d'autre part les besoins fluctuants en main-d'œuvre au sein
de l'entreprise40.
La mise en mouvement de la logique d'allocation a conduit à l'émergence de
l'évaluation. Cette dernière doit permettre de satisfaire la logique d'adéquation
entre les hommes et les emplois en facilitant la mise en relation entre d'un côté les
« aptitudes productives individuelles d'un travailleur » et de l'autre « la situation
de travail à laquelle il est affecté » au moyen de la description des « aptitudes productives individuelles » des salariés41. Elle s'inscrit ainsi dans une véritable
démarche gestionnaire visant à optimiser le rapport coût-efficacité42. Dans un
souci de rationalisation de la décision, l'évaluation devient alors le fondement de
la décision de gestion. La corrélation entre l'émergence d'une évaluation systématisée et la progression de l'assise des ressources humaines dans l'entreprise ne
relève donc en aucun cas d'une coïncidence.
D'un point de vue gestionnaire, l'évaluation est un mode d'information sur
le travail et les compétences, facilitant la décision adaptée. En d'autres termes, elle
répond à une volonté de limiter la part d'incertitude dans la décision en augmentant son fondement cognitif. La connaissance des qualités professionnelles d'une
personne constitue donc un moyen, pour l'employeur, d'exercer de façon éclairée
son pouvoir de gestion de l'entreprise.
45. La deuxième fonction est une fonction touchant à l'engagement du salarié. Il s'agit de favoriser l'obéissance du salarié non pas uniquement aux ordres de
l'employeur mais également aux intérêts de l'entreprise43. Dans l'optique du
management participatif, les gestionnaires ont pour ambition de favoriser l'investissement personnel des salariés. L'évaluation va rapidement constituer l'un des
piliers du management participatif dès lors qu'elle constitue un fondement pour
les décisions de gestion de type promotion ou encore attribution d'une prime.
46. En termes de discipline, la dualité de fonctions du cadre « manager »
correspond à la réunion de deux disciplines gestionnaires, la gestion des ressources humaines d'une part et le développement des ressources humaines d'autre
part. La première constitue une « approche mécaniste où l'individu est considéré
comme une ressource au même titre que les matières premières, la technologie ou
l'information, ressource qu'il faut gérer afin qu'elle donne le meilleur de sa performance et participe ainsi au développement économique de l'entreprise, gage de
sa survie : dimension sociale, juridique, rémunération, contractualisation »44.
À l'inverse, le développement des ressources humaines se définit non pas comme
39. Par opposition à l'idée que « les hommes sont des ressources », J.-M. Peretti, Gestion des
ressources humaines, 16e éd., 2009, p. 1.
40. J.-P. Citeau et Y. Barel, Gestion des ressources humaines, Sirey, 5e éd., 2008, p. 49.
41. B. Baudry, B. Dubrion, « Quels modèles d'évaluation du travail », Travail et emploi, n° 104,
2005, p. 8.
42. A. Abelhauser, R. Gori et M.-J. Sauret, La folie Évaluation - les nouvelles fabriques de la
servitude, Mille et une nuits, 2011, p. 17.
43. N.  Chaignot, La servitude volontaire aujourd'hui - Esclavages et modernité, PUF,
coll. « Partage du savoir », 2012, p. 175.
44. S. Courau, « Le taylorisme relooké : formation et évaluation en entreprise », Communication
et langages 2001, n° 127, p. 97.
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