Bibliothèque de droit de l'urbanisme et de l'environnement - Tome 17 - Le maire et la protection de l'environnement - 187

FACULTÉ OU OBLIGATION D'AGIR POUR LE MAIRE?

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une interprétation téléologique du texte plutôt qu'une interprétation stricte, en
s'inspirant de l'ensemble des dispositions encadrant la police des déchets et surtout
du but poursuivi par celle-ci. Par ailleurs, le Conseil d'État considère que le juge
doit effectuer un plein contrôle sur l'obligation d'agir du maire et qu'en cas d'abstention de sa part, il n'y a donc pas lieu de rechercher l'erreur manifeste15.
359. De toute évidence, une interprétation purement littérale de la disposition
instituant la compétence municipale est certes nécessaire mais insuffisante pour savoir
si le maire est ou non tenu d'agir. Dans certains cas, cette interprétation sera même peu
fructueuse. Il en est ainsi des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du CGCT dont la lecture
ne permet pas de dégager clairement la nature du lien unissant le maire à son pouvoir
de police16. La formule habituelle « le maire peut prendre, interdire... », ou a contrario
« le maire prend, interdit... », n'est pas utilisée. Il revenait donc au juge administratif de
préciser si ce texte renfermait ou non une contrainte d'action. Celui-ci a dégagé une
simple faculté d'agir au profit du maire17. Toutefois, certainement conscient de l'invraisemblance qu'il y a à reconnaître une liberté absolue au profit de l'autorité administrative pour agir afin de préserver un impératif tel que l'ordre public, le juge administratif
a envisagé une obligation pour le maire de faire usage de ses pouvoirs de police générale dans des situations particulièrement menaçantes pour l'ordre public18.
2. Les oscillations de la jurisprudence administrative
360. Le Conseil d'État retient dans un considérant de principe que « le refus
opposé par un maire à une demande tendant à ce qu'il fasse usage des pouvoirs de
police à lui conférés par l'article précité de la loi du 5 avril 1884 n'est entaché d'illégalité que dans le cas où, à raison de la gravité du péril résultant d'une situation
particulièrement dangereuse pour le bon ordre, la sécurité ou la salubrité publique,
cette autorité, en n'ordonnant pas les mesures indispensables pour faire cesser ce
péril grave, méconnaît ses obligations légales »19. Comme le souligne Fabrice
Melleray, trois conditions sont ainsi posées, « la mesure sollicitée doit être indispensable (1re condition) pour faire cesser un péril grave (2e condition) résultant
d'une situation particulièrement dangereuse pour l'ordre public (3e condition) »20.
15. CE, 13  octobre 2017, M. et Mme B., requête  n° 397031, note Mehdi Bahouala, AJCT,
22 février 2018, n° 2, pp. 105-106 : « Considérant que, s'agissant des déchets déposés dans le courant de
l'année 2009, la cour a retenu que le refus de l'autorité titulaire du pouvoir de police de faire usage des
pouvoirs que lui confère l'article L. 541-3 du code de l'environnement n'est illégal que s'il est entaché
d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la gravité de l'atteinte portée à l'environnement et
qu'en l'espèce le maire de Six-Fours-les-Plages n'avait pas commis d'illégalité et n'avait, par suite, pas
engagé la responsabilité de la commune, en s'abstenant d'assurer aux frais des intéressés l'enlèvement des
déchets dont les producteurs avaient pu être identifiés ; qu'en se bornant à rechercher si l'abstention du
maire était entachée d'erreur manifeste, alors qu'il lui appartenait d'exercer un plein contrôle sur le
respect de l'obligation définie au point 5 ci-dessus, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; ».
16. Ce n'est toutefois pas le cas pour l'article L. 2212-4 du CGCT  qui prévoit une obligation
pour le maire, confronté à un danger grave ou imminent, de prescrire « l'exécution des mesures de
sûreté exigées par les circonstances ».
17. CE, 23 octobre 1959, Doublet, requête n° 40922, Recueil, p. 734, note Marcel Waline, RDP,
1960, pp. 802-808.
18. Le rapporteur public Antoine Bernard, dans ses conclusions sur l'affaire Doublet, envisage
ainsi l'obligation d'agir « dans l'hypothèse, difficile à mieux définir, où en s'abstenant d'user de ce pouvoir
cette autorité méconnaîtrait les exigences les plus élémentaires ou les plus essentielles de la protection de
l'ordre public et manquerait en définitive manifestement et gravement à sa mission » (Antoine Bernard,
« Conclusions sur l'arrêt CE, 23 octobre 1959, Doublet », RDP, 1959, p. 1240).
19. CE, 23 octobre 1959, Doublet, loc. cit.
20. Fabrice Melleray, « L'obligation de prendre des mesures de police administrative initiales »,
loc. cit., p. 73.
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