Bibliothèque de droit de l'urbanisme et de l'environnement - Tome 17 - Le maire et la protection de l'environnement - 228

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LE MAIRE ET LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT

de la responsabilité qui sont utilisés par le juge administratif pour favoriser l'indemnisation des victimes. En revanche, le schéma traditionnel de responsabilité est beaucoup moins adapté à la réparation du préjudice écologique pur. Ainsi, comme le
souligne Agathe Van Lang, « si nous considérons à présent la réparation du préjudice
écologique « pur », c'est-à-dire de l'atteinte au milieu naturel composé de choses communes parfois désignées comme des « biens environnementaux » (l'eau, l'air, la flore et
la faune sauvage...) nous constatons que l'application des règles classiques de la responsabilité civile se heurte à un certain nombre d'obstacles. Pour commencer, le dommage écologique est rarement à la fois certain, direct et personnel, caractères qui conditionnent normalement la réparation »221. Pour ces raisons, le préjudice écologique pur
est le plus souvent nié par le juge administratif lorsqu'il est amené à se prononcer sur
la responsabilité de l'administration, y compris celle de la commune222.
433. Concernant cette dernière, un obstacle supplémentaire pourrait également expliquer l'absence de prise en compte du préjudice écologique pur par le
juge administratif, au moins pour ce qui est des cas de responsabilité résultant de
la carence du maire à exercer sa police générale. Cette police étant guidée par des
composantes n'ayant pas directement intégré la protection de l'environnement,
elle ne peut pas être utilisée exclusivement à cette fin, et encore moins être mise en
cause pour ne pas l'avoir fait. Il est difficile, en effet, d'exiger du maire une réparation pour un préjudice écologique qu'il n'est même pas autorisé à parer223.
Ainsi, à l'échelle de la commune, la vision anthropocentrique de la responsabilité
va de pair avec celle de la police du maire, au moins dans sa mission de protection
de l'ordre public général qui n'a pas intégré l'objectif environnemental224. Mais en
ce qui concerne les polices qui poursuivent cet objectif, l'absence de prise en
compte du préjudice écologique pur est apparu relativement problématique.
434. Des tentatives pour obtenir une reconnaissance de ce préjudice ont alors
émergé des milieux associatifs. Les associations de protection de l'environnement
221. Agathe Van Lang, Droit de l'environnement, PUF, Paris, 4e édition, 2016, p. 295. Concernant
le caractère certain du préjudice, l'auteur précise notamment que « la certitude du dommage écologique
est difficile à établir : les atteintes causées aux milieux par les pollutions présentent souvent un caractère
diffus dans leur manifestation, qui leur permet de rester inaperçues pendant de longues périodes » (p. 272).
L'auteur retient également que « le caractère direct du dommage écologique pose également des difficultés.
Le lien causal direct existant entre une atteinte causée à l'environnement et l'une des multiples sources de
pollution possibles est particulièrement délicat à établir, en raison de la complexité des processus naturels,
du caractère cumulatif et synergique des pollutions, du fait que les effets nocifs d'un rejet ou d'un accident
peuvent être ressentis en un point très éloigné, ou longtemps après l'événement générateur » (p. 273). Enfin,
« quant au caractère personnel du préjudice écologique, il fait généralement défaut. Si le milieu qui supporte
une atteinte fait l'objet d'un droit privatif, le titulaire de ce droit peut certes faire valoir un préjudice
personnel. Mais toute dégradation causée au milieu naturel ou à ses éléments, dépasse l'intérêt personnel du
propriétaire, pour concerner la collectivité dans son ensemble » (p. 274). Voir dans le même sens Nicolas
Eveno qui précise qu'au regard des « règles traditionnelles de la responsabilité administrative qui imposent
la démonstration pour le requérant d'un préjudice personnel, direct et certain, il découle naturellement une
absence de prise en compte expresse de la spécificité du dommage écologique » (Nicolas Eveno, La police
administrative et le contentieux de l'environnement, op. cit., p. 312). Ces préconisations sont reprises dans
le rapport Jégouzo, censé avoir guidé la réforme du Code civil en vue d'y intégrer le préjudice écologique
(Yves Jégouzo, Pour la réparation du préjudice écologique, Rapport à Christine Taubira, 17 septembre
2013, http://www.justice.gouv.fr/art_pix/1_rapport_prejudice_ecologique_20130914.pdf).
222. Voir notamment Christian Huglo, « L'inéluctable prise en compte du dommage écologique
par le juge administratif », AJDA, 1er avril 2013, n° 12, pp. 667-674.
223. Voir supra, § 108 et s.
224. Une revalorisation de l'ordre public général est donc souhaitable. Voir à ce sujet, supra,
§ 203 et s.

http://www.justice.gouv.fr/art_pix/1_rapport_prejudice_ecologique_20130914.pdf

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