Cours - Droit pénal des affaires - 3e - 269

La responsabilité pénale du chef d'entreprise
des infractions commises dans ce cadre. On ne peut, en ce sens, retenir un cumul de responsabilité
du délégant et du délégataire, la délégation permettant d'identifier la personne responsable
dans le domaine considéré21
.
En l'espèce, du fait de la délégation de pouvoirs, Martine Chaire, dirigeante, est exonérée, et Marc
Monet, délégataire, pourra être déclaré pénalement responsable de travail dissimulé si tous les
éléments constitutifs de l'infraction sont réunis à son égard. Il lui incombait en effet de s'assurer
de la mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures équivalent à celui réellement effectué.
Toute infraction commise dans ce cadre, dès lors qu'il est établi qu'il disposait de la compétence,
de l'autorité et des moyens nécessaires entraîne sa responsabilité. Son absence de contrôle, ou sa
défaillance dans le contrôle dans la délivrance du bulletin de paie est fautive, puisqu'il a délivré ou
fait délivrer volontairement un bulletin de paie qui ne mentionnait pas toutes les heures effectuées.
Cependant, la Cour de cassation a aménagé une exception : la délégation de pouvoirs exclut la
responsabilité pénale du chef d'entreprise, sauf participation personnelle de celui-ci22
.En effet,
malgré unedélégation depouvoirsvalable, ledirigeant ne sauraits'exonérer de sa responsabilité
s'il s'est immiscé dans les pouvoirs délégués. Cette immixtion peut être établie en démontrant
que le dirigeant a pris part à la décision constitutive de l'infraction. Elle peut l'être également s'il
est établi qu'il avait connaissance des faits incriminés et n'a pas révoqué la délégation de pouvoirs
malgré l'inaction du délégataire23
.
En l'espèce, la présidente directrice générale est directement en contact avec le directeur de l'établissement
concerné par les faits de travail dissimulé. Selon Marc Monet, elle est la seule interlocutrice
du directeur de l'établissement en cas de difficultés concernant les ressources humaines.
Pour autant, rien ne permet d'affirmer que Martine Chaire a participé de quelque manière que ce
soit dans l'établissement des bulletins de paie mentionnant des nombres d'heures erronés. Même
si celle-ci a pu insister pour diminuer le coût représenté par les heures supplémentaires, elle n'a -
semble-t-il - pas provoqué à commettre de tels faits. Sauf à démontrer le contraire, elle n'apas
participé personnellement à l'infraction de travail dissimulé.
Ainsi, la responsabilité pénale pour travail dissimulé est transférée au directeur des ressources
humaines, Marc Monet. Martine Chaire, délégante, est exonérée et le délégataire est pénalement
responsable. Ce dernier invoque cependant des subdélégations pour s'exonérer de cette responsabilité
pénale.
III. La validité des subdélégations de pouvoir
Le directeur des ressources humaines, délégataire de pouvoirs s'agissant de la rémunération des
salariés, affirme avoir subdélégué ses pouvoirs au directeur de l'établissement concerné et à la
directrice adjointe, chacun se voyant déléguer des pouvoirs distincts. Il s'agit alors de déterminer
si Marc Monet peut être exonéré. Il faut pour cela examiner s'il s'agit d'une codélégation (A) et si
la subdélégation est, en elle-même, valable (B).
21. Cass. crim., 14 nov. 2006, nº 05-83367, JCP S 2007, 1470, obs. J.-F. CESARO.
22. Cass. crim., 11 mars 1993, préc.
23. Cass. crim., 6 févr. 2001, nº 00-84104, Dr. pénal 2001, comm. 78, obs. J.-H. ROBERT.
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