Cours - Droit pénal des affaires - 3e - 326

DROIT PÉNAL DES AFFAIRES
Aux termes de l'article 121-6 du Code pénal, « sera puni comme auteur le complice de l'infraction, au
sens de l'article 121-7 ». L'article 121-7 dudit code prévoit qu'est complice celui qui, « sciemment, par
aide ou assistance, a facilité la préparation ou la consommation d'un délit ».
La complicité est par conséquent soumise à la réunion de plusieurs conditions. D'abord, il doit
exister un fait principal punissable. Ensuite, on doit pouvoir reprocher à la personne soupçonnée
un acte de complicité intentionnel, c'est-à-dire, à l'imageden'importe quelle infraction pénale, un
élément matériel et un élément moral.
En l'espèce, le fait principal punissable réside dans le délit de banqueroute par emploi de moyens
ruineux commis par Monsieur Serpentin.
Sur le plan matériel, il faut démontrer l'existence d'un fait positif d'aide ou assistance, antérieur ou
concomitant au fait principal punissable. Cet élément ne pose en général pas de difficulté ; il suffit
de constater que le prêt du banquier a contribué à créer ou aggraver l'état de cessation des paiements,
ce qui est le cas en l'espèce.
Sur le plan moral, l'utilisation du terme « sciemment » dans l'article 121-7 implique un mode de participation
intentionnel. Les choses sont alors plus délicates. Le banquier, c'est certain, avait connaissance
des difficultés financières particulièrement graves de l'entreprise « Serpent Construct ». Mais
devait-il avoir conscience que le prêt demandé avait pour but de retarder ou éviter l'ouverture d'une
procédure de redressement judiciaire ? Autrement dit, le banquier n'est-il complice que lorsqu'il a
voulu s'associer à une tentative d'évitement de la procédure collective ? Une partie de la jurisprudence
est en ce sens lorsqu'elle juge quelebanquier nepeut êtrecondamnéque s'il connaissait
pertinemment l'état de cessation des paiements, le caractère ruineux du crédit ainsi que la volonté
du débiteur de retarder le dépôt de bilan (Cass. crim., 18mai 1976, D. 1976, 578, note GAVALDA ;CA Paris,
14 février 2000, D. 2002, 205, obs. J. P. SORTAIS ; RTD com. 2001,p. 238,obs. C. MASCALA).
Il est difficile en l'espèce d'être convaincu que le banquier de Monsieur Serpentin souhaitait l'aider à
éviter ou retarder le redressement. Ceci étant, on reproche la plupart du temps aux banquiers d'avoir
tout simplement desservi les intérêts d'une entreprise en prêtant de l'argent en connaissance de
cause, c'est-à-dire d'avoir, sur le plan matériel, accordé un prêt dépassant les possibilités financières
de l'emprunteur et, sur le plan moral, connu ses graves difficultés financières (Cass. crim., 12mars 1998,
Juris-Data nº 1998-001908). Dans ces conditions, le banquier de Monsieur Serpentin devrait être sanctionné
au titre de la complicité puisqu'il lui avait fait part de « sa frilosité » et lui a accordé néanmoins
le prêt à la condition qu'il accepte un taux d'intérêt « au niveau du risque pris ».
2. L'encaissement de chèques destinés à l'entreprise, le paiement d'honoraires
« fictifs » et le transfert de fonds vers une autre société ou la question
du détournement d'actif
Aux termes de l'articleL. 654-2, 2º du Codedecommerce, est constitutif du délitdebanqueroute le
fait d'avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif du débiteur (matériel de l'entreprise, règlements
de clients, contrats de construction...), privant ainsi les créanciers d'unepartiedeleur gage.
L'article L. 654-2 distingue deux comportements consistant à faire disparaître tout ou partie des
éléments mobiliers ou immobiliers compris dans l'actif de l'entreprise et devant répondre du
passif exigible. De manière synthétique, le détournement et la dissimulation portent atteinte à
l'actif social au détriment des créanciers, le premier en en disposant (notion de détournement) et
le second en le soustrayant (notion de dissimulation).
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