Systèmes - Les sources constitutionnelles du droit administratif - 10e - 191

Les institutions

Tel n'était pas le cas, dans l'affaire Koen, pour un élève de classe préparatoire qui demandait à n'assister à aucun enseignement le samedi, alors que
l'emploi du temps comportait un nombre important de cours et de contrôle
de connaissances organisés le samedi matin.
Pour les enseignants, les exigences de neutralité sont plus fortes. Dès
une décision du 10 mai 1912, Abbé Bouteyre, le Conseil d'État juge légal, au
nom du principe de laïcité, le refus du ministre de l'Instruction publique
d'autoriser un ecclésiastique à se présenter au concours de l'agrégation
de philosophie. Même s'il n'est pas sûr que cette jurisprudence serait appliquée aujourd'hui avec la même rigueur, un avis contentieux du Conseil
d'État du 3 mai 2000, Mlle Marteaux, rappelle que, si les enseignants bénéficient, comme tous les agents publics, de la liberté de conscience, « le principe de laïcité fait obstacle à ce qu'ils disposent, dans le cadre du service public,
du droit de manifester leurs croyances religieuses ». Un enseignant ne peut
donc porter à l'école un signe quelconque d'appartenance religieuse. Cette
position est aussi celle de la Cour européenne des droits de l'homme, qui a
rejeté la requête d'une institutrice du canton de Genève à qui il avait été
interdit de porter le foulard dans l'exercice de ses activités (CEDH, 15 févr.
2001, Dahlab c/ Suisse).
Au-delà de l'enseignement, la laïcité exprime des valeurs fondamentales
qui concernent la société dans son ensemble.
Est ainsi légal un refus d'acquisition de la nationalité française opposé à
l'épouse d'un Français qui, par le port constant de la burqa, marque un
refus délibéré d'accepter ces valeurs, et notamment l'égalité des hommes
et des femmes (CE, 27 juin 2008, Mme Mabchour). Les exigences que la vie en
commun impose à tous ont été fortement réaffirmées par la loi du 11 octobre 2010, qui interdit de dissimuler son visage dans l'espace public. Par sa
décision du 7 octobre 2010, le Conseil constitutionnel l'a jugée conforme à la
Constitution, sous la seule réserve, inspirée par les impératifs de respect de
la liberté religieuse, qu'elle ne s'applique pas dans les lieux de culte ouverts
au public. Par une décision du 1er juillet 2014, SAS c/ France, la Cour européenne des droits de l'homme a admis la compatibilité de la loi du 11 octobre 2010 avec la Convention, reconnaissant aux États une large marge
nationale d'appréciation, en l'absence de communauté de vues entre les
pays membres du Conseil de l'Europe sur la question du port du voile intégral dans l'espace public. Une loi comparable adoptée en Belgique a été
jugée conforme tant à la constitution belge (Cour constitutionnelle de
Belgique, 6 déc. 2012) qu'à la Convention européenne des droits de l'homme
(CEDH, deux décisions du 11 juillet 2017, Belcacemi et Oussar c/ Belgique).
Dans le cadre du travail, l'employeur, même privé, peut imposer à ses
salariés des obligations de neutralité. La Cour de cassation a d'abord jugé
légale l'interdiction du port du foulard islamique aux agents d'une caisse
d'assurance-maladie, organisme de droit privé chargé de la gestion d'un
service public (13 mai 2013, Mme Abibouraguimane c/ Caisse primaire d'assurance-maladie de Seine-Saint-Denis). Après avoir le même jour pris une

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