Systèmes - Les comptes publics : objets et limites - 1re - 59

Les évolutions et limites de la comptabilité budgétaire

II.

Le démembrement de l'État
et la multiplication des budgets

Une des difficultés majeures de la comptabilité de l'État est relative à
son périmètre. De quoi fait-on les comptes ? Matériellement, il s'agit bien
de proposer une information sur l'action des administrations publiques. Si
on laisse de côté l'épineuse question de la définition de ce que sont les
administrations publiques11, on rencontre immédiatement une autre difficulté : doit-on proposer un compte unique de l'État (en tant que puissance
publique exerçant l'action publique) ou doit-on démembrer cette présentation en fonction des différentes structures qui mettent en œuvre l'action
publique ? La réponse juridique et pratique est clairement en faveur de la
deuxième solution, les attentes en matière d'informations sur les finances
publiques supposeraient plutôt la première. L'observation du démembrement de la comptabilité budgétaire traduit l'évolution de l'organisation
administrative de l'action publique et transcrit la question de la difficulté à
appréhender le périmètre de l'action publique. On peut décrire ce démembrement selon trois axes. L'évolution de l'interventionnisme et des formes
de sa gestion correspond à une multiplication des structures plus ou moins
autonomes (A). La décentralisation est un mouvement très ancien qui s'est
notoirement accéléré à la fin du XXe siècle, elle constitue un autre axe d'observation de l'émiettement budgétaire (B). L'apparition de nouvelles missions relatives à la protection sociale a encore conduit à l'émergence d'acteurs dont les comptes sont si spécifiques qu'ils ne correspondent que de
très loin à l'idée que l'on se fait d'un budget (C).

A. Budgets annexes et budgets autonomes
L'évolution de l'organisation de l'action publique a conduit à distinguer
différents états financiers afin de procéder à une information et surtout à
une gestion plus spécifique de certaines activités. Il existe aujourd'hui, au
sein du budget de l'État, trois sous comptes particuliers qui correspondent
à cette préoccupation : le budget général, les budgets annexes et les
comptes spéciaux.

1. Les budgets annexes ou la tension entre les impératifs
de gestion et la volonté de contrôle politique de l'action publique
Les budgets annexes sont des comptes particuliers du budget de l'État
(ou d'une collectivité territoriale) qui se trouvent en annexe du budget général. Ils apparaissent avec la loi du 9 août 1836 sous couvert de spécialisation
des crédits. On trouve dès 1840, aussi bien en recette qu'en dépense, des
chapitres spéciaux qui annoncent les budgets annexes. Ils se multiplient
dans l'entre-deux-guerres et finissent par représenter 20 % du montant
11. Voir la partie de cet ouvrage consacrée à la comptabilité nationale, p. 120.

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