Bibliothèque de droit privé - Tome 599 - Les théories objective et subjective du contrat - 46

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LES THÉORIES OBJECTIVE ET SUBJECTIVE DU CONTRAT

A. LA TORSION SUBJECTIVE COMME SUBJECTIVATION
DE LA THÉORIE OBJECTIVE
36.  -  Après avoir exposé la présentation doctrinale de la torsion subjective (1), nous montrerons qu'elle est consacrée en droit positif (2).
1.	 La présentation doctrinale de la torsion subjective
37. - Corbin écrit que « le droit des contrats ne peut pas être expliqué par une
théorie sans l'autre. [...] [U]n "accord des esprits" (meeting of the minds) n'est
pas une condition invariante pour la conclusion d'un contrat. Mais s'il est démontré
qu'il n'y a pas eu un tel "accord des esprits", le tribunal ne jugera pas que la partie
est obligée par un contrat différant de sa propre compréhension sauf à ce que ses
mots et conduite étaient tels qu'elle avait une raison de savoir que l'autre partie
serait, et a été dans les faits, induite en erreur »24.
Corbin expose ici les deux conditions qu'il s'agit de vérifier pour savoir si la
volonté interne, différente de la volonté manifestée, peut empêcher le contrat de se
former. Il y a d'abord une condition appréciée objectivement (apprécier l'usage et la
compréhension normaux, communs, du mot) puis une condition considérée subjectivement (vérifier que l'autre partie s'est bien effectivement fondée sur un sens différent). La première condition peut être vérifiée en considérant la signification donnée
à l'expression de la volonté telle qu'elle serait comprise par une personne raisonnable.
Quant à la deuxième condition, « des preuves bien plus directes et persuasives (telles
que des déclarations qu'il a reçues ou qu'il a faites) peuvent être disponibles »25.
L'exemple que prend Corbin concerne les contrats d'adhésion imprimés en
petits caractères que le cocontractant n'a, la plupart du temps, pas lus. Cette personne n'a d'ailleurs souvent pas la compétence nécessaire pour comprendre précisément ce à quoi elle s'engage26. Il considère alors, conformément à certaines
24. Arthur L. CORBIN, Corbin on contracts, One volume edition., St. Paul, Minnesota, West
PubCo, 1952, p. 156‑157, §106. : « The law of contract can not be explained by either of these theories
standing alone. [...] a 'meeting of the minds' is not an unvarying prerequisite to an enforceable
contract. But if it is made clear that there has in fact been no such 'meeting of the minds', the court
will not hold a party bound by a contract varying from his own understanding unless his words and
conduct were such that he had reason to know that the other party would be and was in fact misled. »
25. Ibid.,  p.  158. : « in determining whether a party did in fact know the other party's
understanding, much more direct and cogent evidence (such as statements made to hi and by him)
may be available. »
26. Voir par exemple, le cas le plus cité quant à la règle de l'unconscionability, Williams v. WalkerThomas Furniture Co., 350 F.2d 445 (1965), pour plusieurs ventes avec une imputation des paiements
organisés par convention par une clause obscure pour s'assurer que la personne ne puisse payer le prix
d'un objet particulier. "The contract further provided that 'the amount of each periodical installment
payment to be made by (purchaser) to the Company under this present lease shall be inclusive of and
not in addition to the amount of each installment payment to be made by (purchaser) under such
prior leases, bills or accounts ; and all payments now and hereafter made by (purchaser) shall be
credited pro rata on all outstanding leases, bills and accounts due the Company by (purchaser) at the
time each such payment is made.' The effect of this rather obscure provision was to keep a balance due
on every item purchased until the balance due on all items, whenever purchased, was liquidated. As a
result, the debt incurred at the time of purchase of each item was secured by the right to repossess all
the items previously purchased by the same purchaser, and each new item purchased automatically
became subject to a security interest arising out of the previous dealings").
La Cour d'appel fédérale des États-Unis du district de Columbia juge alors que le contrat ne
doit pas être execute en ce qu'il n'a pas pu être compris par l'acquéreur ("when a party of little
bargaining power, and hence little real choice, signs a commercially unreasonable contract with little
or no knowledge of its terms, it is hardly likely that his consent, or even an objective manifestation of

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