Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 154 - Des gouvernements sous le regard de leur parlement - 224

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DES GOUVERNEMENTS SOUS LE REGARD DE LEUR PARLEMENT

dans le cas italien que dans le cas français de la seule appréciation des exécutifs, il
serait plus judicieux de parler d'un « contrôle spécial » que d'une « procédure
législative spéciale ». Par ailleurs, contrairement aux lois organiques, aux lois de
finances ou aux lois constitutionnelles qui permettent la modification de leur
texte par les parlementaires, le droit d'amendement des projets de loi portant
ratification n'a été possible en France qu'en 2003, et la pratique des présidents des
chambres italiennes a été de déclarer systématiquement ce type d'amendements
irrecevable. En effet, la privation du droit d'amendement est nécessaire au vu de
l'objet du projet de loi qui vise à obtenir l'autorisation parlementaire. Si « le Parlement modifie les termes de l'autorisation, ce n'est plus une autorisation, mais
une "injonction" donnée par le Parlement au Président de la République, ce qui
absolument contraire à la Constitution. »117 Certains constitutionnalistes italiens
ont soutenu que l'autorisation parlementaire met sur un pied d'égalité l'exécutif
et le législatif parce que le Parlement a le droit de se prononcer sur chaque partie
du traité international qui lui est soumis et que l'administration est obligée de lui
envoyer les instruments de ratification118. Néanmoins, de facto le parlement italien, comme d'ailleurs son homologue français, n'a que le droit de prononcer un
nihil obstat. Les deux parlements évaluent la politique du gouvernement en
matière de suppression des contrôles aux frontières et décident - ou non - de
l'adoption de la mesure gouvernementale119.
410. Le passage parlementaire de la CAAS confirme la difficulté de l'exercice d'un « vote sanction » lors de la phase de ratification. Sur un total de 561
votes exprimés à l'Assemblée nationale, 495 étaient en faveur du texte et seulement 61 étaient contre - 26 de ces votes négatifs avaient été exprimés par des
membres du parti communiste120. Une situation similaire est enregistrée au
Sénat. Sur les 320 votes exprimés, 227 étaient en faveur de la ratification et 78
contre121. Il en va de même à la Camera dei deputati, où seulement 34 sur 248
votes étaient contre l'adoption, ces votes ayant été exprimés par des membres du
groupe communiste et du Groupe « Verdi-La Rete ». Cette écrasante majorité
s'explique aussi par le contexte particulier d'une intégration européenne qui
transforme le clivage entre majorité et opposition en un clivage parlementaires
pro-intégration européenne et parlementaires souverainistes. L'existence d'un tel
clivage est confirmée par les votes exprimés aussi bien au sein du parlement français qu'au sein de son homologue italien. Les votes ne suivent pas les lignes de
démarcation entre la majorité et l'opposition. La majorité socialiste pro-européenne en France et la majorité chrétienne-démocrate en Italie ont souhaité
poursuivre la voie de l'intégration européenne en votant à l'unanimité la ratification de la Convention. L'opposition a elle aussi voté majoritairement en faveur
de ces lois de ratification. Par ailleurs, la lecture des débats parlementaires por117. Michel Debré : JOAN 16 juin 1977, p. 3725 cité dans France, Code constitutionnel 2016,
commenté sous la direction de Thierry S. Renoux, Michel de Villiers, Xavier Magnon, 879.
118. Mortati, Costantino, Istituzioni di diritto pubblico, Padova, CEDAM, 1991.
119. Saïdj, 115.Les gouvernements peuvent engager leur responsabilité politique pour obtenir
l'autorisation parlementaire pour un accord ou d'un traité (art. 49 C fr. et 94 C. it et art. 143,3 R.C
et 46, 2 R.S).
120. France, Débat parlementaire. Compte rendu integral. Seconde session ordinaire de 1990-1991,
2e séance ; France, Assemblée Nationale, Débat parlementaire. Compte rendu integral. Seconde session
ordinaire de 1990-1991, 1re séance, Journal Officiel de la République Française, 3 juin 1991.
121. France, Débat parlementaire. Compte rendu intégral. Seconde Session ordinaire de 19901991, 45e séance.

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