Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 154 - Des gouvernements sous le regard de leur parlement - 297

Les motivations et l'expertise des parlementaires

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un domaine de spécialisation, préférant, en revanche, se mobiliser sur un spectre
large d'enjeux européens. Dans le cas italien, l'explication réside en partie dans le
taux élevé de renouvellement des parlementaires qui empêche toute spécialisation. Dans le cas des membres de la Chambre des communes, deux raisons
semblent empêcher tout débat sectoriel. D'une part, la plupart des parlementaires
n'éprouvent aucun intérêt pour les questions européennes. Ils préfèrent donc
suivre les consignes des chefs de parti. D'autre part, les autres adoptent une
approche contestataire à l'égard de l'Europe, ce qui empêche un débat par politique sectorielle. Les propos d'un député membre du Parti travailliste sont très
significatifs pour décrire les motivations de ses collègues :
AT : Selon votre expérience qu'est-ce qui motive vos collègues à s'investir dans l'examen des dossiers européens de sécurité intérieure ?
Kelvin Hopkins (Lab) : Eh bien, la grande majorité d'entre eux n'y
trouvent aucun intérêt. D'un côté, il y a un petit nombre qui a une vision très
forte de l'Europe et un petit groupe de l'autre côté qui sont très critiques à ce
sujet. Et la plupart de mes collègues travaillistes suivent le chef du parti. Ils
sont vaguement en faveur de l'Europe, telle qu'ils la conçoivent, un bel endroit
où je passe mes vacances et je bois du vin français... C'est à ce niveau de naïveté
que mes collègues se placent. Je pense que la grande majorité des députés n'a
aucun ou un très faible intérêt pour l'Union européenne. Donc, la plupart d'entre
eux n'a aucun intérêt du tout et ils disent, oh laissez cela au chef. Mais ceux qui
prennent un intérêt plus profond, comme moi, je pense, sont assez rares.
AT : Et ceux-là, qu'est-ce qui les motive ?
Kelvin Hopkins (Lab) : Je pense que certains d'entre eux, comme une minorité des conservateurs, sont des néo-libéraux radicaux, des gens comme John Major
ou même Tony Blair. Mais je pense qu'il y a trois groupes : ceux de la droite nationaliste, ceux de la gauche socialiste et quelque part au milieu vous avez ce groupe
néolibéral avec Clegg, Cameron et Blair...si vous les mettez tous ensemble dans une
pièce ils se mettront d'accord entre eux, mais certaines personnes de leur parti ne
seront pas du tout d'accord avec eux. Mais, la grande majorité des députés travaillistes ne s'intéressent guère à l'UE. Si le chef du parti décide dès demain d'être
eurosceptique, beaucoup d'entre eux vont juste changer d'opinion35.
565. Plusieurs députés provenant de tous les partis politiques représentés à
Westminster ont tenu des propos similaires lors des entretiens réalisés en novembre
et décembre 2013 à la Chambre des communes. Il est évident, que malgré nos
insistances sur le domaine européen de liberté, sécurité et de justice, la réponse de
notre interlocuteur renvoie à l'Union européenne au sens très large et non pas à
une politique sectorielle. Nous reviendrons sur ce type de parlementaires dans la
section suivante de ce chapitre.
566. Guy Geoffroy est né en 1949. Il fait ses études secondaires au lycée de
Montgeron où il obtint un baccalauréat en philosophie. Après sept ans d'études
universitaires, il obtient une licence de droit public et un DES de science politique.
En parallèle, il travaille dans des lycées techniques et professionnels et devient, en
1982, le plus jeune proviseur de France. Il est élu député de la 9e circonscription de
35. Entretien Kelvin Hopkins (Labour), membre European Scrutiny Committee, House of
Commons, Londres, 5 décembre 2013.

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