Bibliothèque de droit public - Tome 317 - Sans domicile fixe et droit - 304

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SANS DOMICILE FIXE ET DROIT

SDF évacuées144 ou de prononcer des délais de sursis à exécution afin que la situation sanitaire et sociale des personnes expulsées soit dûment prise en compte145.
En filigrane, se dessine donc progressivement une obligation de moyens à la
charge des autorités publiques pour conditionner la mise en œuvre d'une expulsion, du moins lorsque celles-ci sont à l'origine de l'évacuation des sans-abri.
458. La constitutionnalité et la faisabilité d'une obligation de relogement. D'aucuns pourraient alors objecter que cette interprétation est inconstitutionnelle et/
ou trop complexe à mettre en œuvre. Cette argumentation serait sûrement vaine.
En premier lieu, le Conseil constitutionnel a expressément reconnu que l'obligation de procéder au relogement des occupants d'immeubles affectés par une opération d'aménagement n'entraîne aucune privation de propriété146. Il serait douteux
de considérer que la constitutionnalité de ce dispositif n'est plus reconnue à une
éventuelle obligation de relogement des occupants sans titre. Du reste, une obligation de résultat de relogement dont les autorités administratives seraient les
-débitrices ne fait pas nécessairement obstacle à l'exécution d'une décision juridictionnelle. Cela serait le cas uniquement dans l'hypothèse où la sanction du non-respect de cette obligation se traduit par un refus de prêter le concours de la force
publique. Or, il est possible d'envisager une autre sanction à travers l'engagement de
la responsabilité publique. Pour le dire autrement, l'administration qui ne propose
pas de solution de relogement pourrait engager sa responsabilité sans que cela fasse
obstacle à son obligation de prêter le concours de la force publique sauf circonstances impérieuses tenant à l'ordre public. Cette solution, moins protectrice pour
les personnes SDF puisqu'elle ne privilégie pas le maintien physique dans les lieux,
permettrait de maintenir le respect de la chose jugée tout en engageant l'État. 
En second lieu, le Conseil constitutionnel - qui a rattaché cette obligation à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accès à un logement décent147 - a expressément
balayé la portée de tout argument d'ordre technique en considérant qu'« à supposer
que le relogement des occupants évincés soit susceptible de se heurter à des difficultés
pratiques, celles-ci ne sauraient être retenues pour l'examen de la constitutionnalité des
en évidence le fait que trois ans après son entrée en vigueur, la circulaire interministérielle du 26 août 2012
reste peu ou mal appliquée par les services de l'État », DÉFENSEUR DES DROITS, Bidonvilles et
hébergement d'urgence : bilan de l'action du défenseur des droits, 8 octobre 2015.
144. D'après le Défenseur des droits, « C'est ainsi que le juge des référés du Tribunal administratif
de Lyon (TA Lyon, 4 avril 2013, n° 13022164) a condamné sous astreinte le préfet du Rhône à trouver
une solution d'hébergement d'urgence à une famille composée de deux parents et de six enfants en bas âge
qui venait d'être expulsée d'un campement sans solution d'hébergement appropriée. Il a également estimé
que l'argument tendant à faire valoir que, malgré les efforts des services de l'État, les capacités d'accueil
en urgence étaient saturées n'était pas recevable, et que ces services ne pouvaient justifier l'absence de
solution offerte à une famille sans-abri composée d'enfants en bas âge, compte tenu des conséquences
graves pour ces derniers. [...] De même, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris (TA Paris,
22 avril 2013, n° 1305344/9) a enjoint au préfet de maintenir deux familles (comprenant plusieurs enfants
mineurs, dont l'un en situation de handicap) dans un centre d'hébergement dans lequel elles étaient prises
en charge depuis trois jours à la suite de l'évacuation du terrain sur lequel elles vivaient depuis plusieurs
mois », Ibid., p. 12 et 13.
145. D'après le Défenseur des droits, également, « dans deux ordonnances du 15 octobre 2012, le
juge de l'exécution du TGI de Nantes a accordé un délai de trois mois aux occupants pour leur permettre
de quitter les lieux dans des conditions décentes, grâce au dispositif d'accompagnement préconisé par la
circulaire interministérielle du 26 août 2012 », Ibid., p. 20.
146. CC, 5 octobre 2016, n° 2016-581 QPC, Société SOREQA SPLA, cdt. 10.
147. Cf. supra §43.

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