L'expert - La cybercriminalité en 11 fiches et plans d'actions - 1re - 49

Fiche 3 · Atteintes à un système de traitement automatisé de données et vol de données

2. Éléments matériels de l'infraction
a) Accès ou maintien frauduleux
Ce délit est un délit formel, ce qui implique que la simple introduction (ou le maintien)
frauduleuse dans un STAD suffit à caractériser l'infraction. Aucun dommage n'est requis.
L'accès et le maintien sont deux éléments distincts du délit, et la jurisprudence retient
donc parfois uniquement l'accès frauduleux, ou uniquement le maintien frauduleux (par
exemple, dès lors que l'accès était régulier mais que le maintien devient frauduleux).
Le premier élément à démontrer pour caractériser le délit de maintien ou d'accès frauduleux consiste à démontrer le caractère frauduleux, c'est-à‑dire l'absence de droits
dans l'accès ou le maintien. Cela vise toute situation où une personne non habilitée/non
autorisée accède ou se maintient dans un système, en connaissance de cause, c'est-à‑dire
en ayant connaissance de son absence d'habilitation.
La définition initiale d'un STAD faisait référence à un dispositif de protection, ce qui aurait
pu impliquer que le caractère frauduleux d'un accès ou maintien dans un STAD ne puisse
exister qu'en présence d'un système de protection qui aurait été violé. Toutefois, la référence à un dispositif de protection n'a pas été retenue aux termes de la loi Godfrain, et la
jurisprudence a donc d'abord admis qu'il n'était pas nécessaire que l'accès (ou le maintien)
soit restreint par un dispositif de protection.
Ainsi, dans un arrêt du 5 avril 19949, la cour d'appel de Paris a constaté que « pour être
punissable, cet accès ou ce maintien doit être fait sans droit et en pleine connaissance de
cause étant précisé à cet égard qu'il n'est pas nécessaire pour que l'infraction existe, que
l'accès soit limité par un dispositif de protection ». Il suffit que " le « maître du système "
[...] ait manifesté l'intention d'en restreindre l'accès aux seules personnes autorisées ».
Un arrêt du 30 octobre 200210 avait toutefois prononcé la relaxe d'un journaliste ayant
accédé à une partie d'un site par la simple utilisation d'un logiciel grand public. En effet,
la cour d'appel avait statué qu'« il ne peut être reproché à un internaute d'accéder aux
données ou de se maintenir dans les parties des sites qui peuvent être atteintes par la simple
utilisation d'un logiciel grand public de navigation. Ces parties de site, qui ne font, par
définition, l'objet d'aucune protection de la part de l'exploitant du site ou de son prestataire de services, devant être réputées non confidentielles à défaut de toute indication
contraire et de tout obstacle à l'accès ».
Toutefois, la position actuelle de la Cour de cassation est moins nuancée en ce qu'elle
considère que « le maintien sans droit et en pleine connaissance de cause dans un
système de traitement automatisé des données suffit à caractériser l'infraction dès lors
que le " maître du système " a manifesté l'intention d'en restreindre le maintien aux
seules personnes autorisées »11.
Il s'agira donc de démontrer que la personne concernée avait connaissance de la volonté
du « maître du système » d'en restreindre l'accès.
L'accès frauduleux vise « tous les modes de pénétration irréguliers d'un système, que
l'accédant travaille déjà sur la même machine mais à un autre système, qu'il procède à
distance ou qu'il se branche sur une ligne de télécommunication »12.

9. CA Paris, 11e ch., sect. A, 5 avr. 1994, JurisData n° 1994-021093, n° 93/01603.
10. CA Paris, 12e ch., sect. A, 30 oct. 2002, Antoine c/ Ministère public, Société Tati, disponible sur :
www.legalis.net.
11. Cass. crim., 3 oct. 2007, n° 07-81045.
12. CA Paris, 11e ch., sect. A, 5 avr. 1994, JurisData n° 1994-021093, n° 93/01603.

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