Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 38 - Les échelles du Levant et de Barbarie - 28

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LES ÉCHELLES DU LEVANT ET DE BARBARIE

Après la conquête du sultanat mamelouk par les Ottomans en 151719, Sélim Ier
confirme20 les privilèges des Français à Alexandrie par un khatt-i sherif de 152821.
24.  Toutefois, ce khatt-i sherif ne se limite pas à reprendre la lettre du commandement de Qânsûh al-Ghûrî. Sous couvert de confirmation, les Ottomans y
introduisent des dispositions d'influence vénéto-byzantine, notamment relatives à
la liberté commerciale, à la compétence juridictionnelle des consuls et au droit des
successions :
Chrysobulle
de 992
§ 1 : Ideo
exaudiunt eorum
deprecationem et
iussum faciunt per
istum suum pium
chrysobullum ut
unusquisque suum
navigium, quod ex
Venetia et ab aliis
partibus veniret
cum suis negociis,
nihil aliud donare
ad ipsum publicum
pro varicatione de
Avido venientes
soldos duos et
descendentes eos ad
suam provinciam
quindecim tantum,
ut pervenirent
ad omnem
donationem per
unumquemque
navigium
perperorum XVII.

Chrysobulle
de 1082
§ 8 : Concessit
autem celsitudo
nostra et eos
universas mercari
specis in omnibus
Romanie partibus,
[...]. Omnium
enim quas quis
dicat specierum
ac rerum concessa
est iis negociatio
et omnium
emptionem in
potestate habebunt
facere, superiores
existentes universa
datione.

Chrysobulle
de 1198
§ 15 : Promittit eis
etiam et licentiam
habere in omnibus
regionibus imperii
mei, tam in iis, que
circa litus sunt,
quam et in iis, que
infra terram, et
in ipsis insulis, et
simpliciter et in
omnibus partibus,
que sub potestate
nostre pie sunt
tranquillitatis,
omnem
mercationem
exercere, et emere
atque vendere
omnem speciem in
regionibus imperii
mei nascentem, et
ex aliis regionibus
in eas allatam sive
per naves per mare,
sive per samaria vel
plaustra per terram.

Privilèges vénitiens
de 1454
Tutti i mercadanti
et subditi della
Illustrissima deta
Signoria de Venexia
cum le sue robe
et cum zò che
haverano, navilij,
navi, fuste grande
et picole habiano
libertà d'intrar
et insir vender et
comprar per tutti
i luogi della mia
Segnoria e quante
volte i vorano et in
li luogi dei homeni
nostri suzeti et
sotoposti ala mia
Segnoria como era
consueto in prima
in la prima et bona
paxe, siano salvi
in mare et in terra
como era uxado
avanti in el tempo
de mio padre.

Khatt-i sherif
de 1527
Que les cathelans et
Françoys et autres
nations qui sont
soubz leur consulat
en Alexandrye aux
ports et plages, ou
en Alexandrye,
ou ailleurs, qu'ilz
soient seurs de
toutes nos contrées,
en terre et en
mer, de tous nos
ministres, [...] et
voulons qu'ilz
aillent et viennent
et demeurent
seurement de bon
gré, tant qu'il
leur plaira, sans
qu'aucun leur
donne ennuy ou
empechement. Si
aulcun d'eulx
vouloit achepter
marchandises
qui ne soient
prohibées, qu'ilz les
puyssent achetter
et qu'aulcun ne soit
si hardy de les en
empêcher.

19. Au sujet de la conquête de l'Égypte par les Ottomans, voir S.  Soucek, « The Ottoman
Conquests of Egypt and Algeria », Conquête ottomane de l'Égypte (1517). Arrière-plan, impact,
échos, éd. B. Lellouch et N. Michel, Leiden, Brill, 2012, p. 79-98.
20. Cette confirmation transparaît notamment au travers du Recueil des traités faictz entre les roys de
France et les grandz seigneurs, empereurs des Turcqs, s. d. : « Longtemps au paravant et mesmes du règne des
Mamelucs d'Egipte, les marchans françoys navigoient, traffiquoient seurement en Alexandrie, au Cayre et
par dans ladite Egipte et avoient ung consul pour eulx et les Cateslans. Despuys sultan Sélim [...], apres
avoir submis à soy toute l'Egipte leur confirma ce privilege et seurté de trafficq audit pays » (Paris, BNF,
ms. fr., 3954, fol. 151-151v). Il semble en effet que des marchands français sont établis en Égypte, depuis le
milieu du xiiie siècle, ainsi que le relève J.-É. Reynaud, Droit romain des ambassadeurs (de legationibus),
droit français des consulats. De l'origine des consulats en pays étrangers, de l'institution consulaire française
depuis le XIIe siècle jusqu'à l'ordonnance de la marine de 1681, Paris, A. Parent, 1873, p. 98 et s.
21. Khatt-i sherif de Soliman, 21 septembre 1528 (éd. F.-E. de Saint-Priest, Mémoires sur l'ambassade
de France en Turquie..., op. cit., p. 345-353). Le terme de khatt-i sherif désigne un décret impérial émanant
directement du sultan. Sur ce point, voir C. Orhonlu, v° Khatt-i Sherif, Encyclopédie de l'Islam, éd. W. O.
Desmond, P. M. Holt, A. K. S. Lambton et B. Lewis, Leiden-Paris, Brill-Maisonneuve et Larose, 1960,
t. IV, p. 1162b-1663a. Pour les transcriptions en caractères latins des termes issus du turc-ottoman ou de
l'arabe, on retiendra l'orthographe choisi par les auteurs de l'Encyclopédie de l'Islam, op. cit.

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