Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 38 - Les échelles du Levant et de Barbarie - 37

L'encadrement international du commerce franco-ottoman

la marine française tire au canon à quatre reprises sur les villes d'Alger et de
-Tripoli. Lors du bombardement d'Alger de 1683, la régence réplique en démembrant au canon le consul français Jean Le Vacher et en massacrant les marchands
présents dans la ville81. Des scènes similaires se répètent en 1688, lorsque le consul
est livré à la vindicte populaire et que plusieurs Français sont exécutés82. En représailles, le maréchal d'Estrée qui dirige les opérations militaires fait pendre autant
de prisonniers algériens. À l'issue de ces conflits, de nouveaux traités sont imposés
aux régences étendant encore ainsi les garanties accordées aux Français83. En
dehors de quelques protestations protocolaires, la Porte qui se révèle incapable de
faire cesser la guerre de course menée par les régences d'Afrique du nord, maintient d'ailleurs une position de neutralité lors de ces évènements, pour ménager
ses relations diplomatiques avec la France84.

SECTION II
LE DOMAINE D'APPLICATION ÉTENDU
DE L'ENCADREMENT INTERNATIONAL
40. La France exerce une triple protection sur le territoire de l'Empire
ottoman85. Les réseaux diplomatiques français protègent les marchands des
principautés européennes qui n'ont pas de rapports directs avec la Porte (I),
ainsi que certains sujets ottomans employés au service du consul ou du corps
des marchands (II). Ces deux mécanismes permettent d'étendre aux individus
protégés le domaine d'application du régime privilégié concédé à la France en
matière commerciale. Un troisième mécanisme de protection porte sur les religieux latins présent sur le territoire turc, mais celui-ci ne concerne pas directement le commerce international86.
I. L'EXTENSION DE L'ENCADREMENT INTERNATIONAL
AUX EUROPÉENS
41. Les capitulations et certains traités prévoient un mécanisme d'extension de
leur régime aux marchands européens qui se placent, dans le Levant, sous la protection du personnel diplomatique français (A). La France qui jouit à l'origine seule de
cette prérogative, subit néanmoins rapidement la concurrence d'autres États qui
réussissent à mettre un terme à son hégémonie en matière de protection (B).
81. R. Gleizes, Jean le Vacher. Vicaire apostolique et consul de France à Tunis et à Alger (16191683), Paris, J. Gabalda, 1914, p. 250-253 ; voir aussi L. Misermont, Le plus grand des premiers
missionnaires de saint Vincent de Paul, Jean Le Vacher, Paris, Gabalda, 1935.
82. H.-D. de Grammont, Relations entre la France et la régence d'Alger au XVIIe siècle, Alger,
Adolphe Jourdan, 1885, t. IV, p. 134.
83. Voir, par exemple, le Traité de paix entre le royaume de France et la régence de Tripoli de
Barbarie, 29 juin 1685, art. 1er (éd. cit., p. 244).
84. G. Poumarède, « La France et les Barbaresques... », loc. cit., p. 141-146.
85. Il n'existe, sur le sujet, qu'une seule monographie ancienne de F. Rey, La protection
diplomatique et consulaire dans les échelles du Levant et de Barbarie, Paris, Librairie de la société du
recueil général des lois et des arrêts, 1899.
86. Sur cette protection particulière, voir F. Rey, La protection diplomatique et consulaire dans les
échelles du Levant et de Barbarie, op. cit., p. 305-382. Sur la place de ces communautés chrétiennes en
Orient, voir également B. Heyberger, Les chrétiens du Proche-Orient au temps de la Réforme
catholique, Rome, BEFAR, 1994.

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