Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 38 - Les échelles du Levant et de Barbarie - 52

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LES ÉCHELLES DU LEVANT ET DE BARBARIE

compromettant ainsi la crédibilité du consul205. On relève aussi des variations
dans le protocole des cérémonies officielles d'une cité à l'autre. Dans la plupart
des échelles, il est par exemple d'usage que les protégés, au même titre que les
marchands français, accompagnent les consuls dans leurs visites au gouvernement local et leurs processions en ville où ils ferment la marche206. Au contraire, à
Alep et à Salonique, ils sont privés de ce droit207, au motif que cet usage, peu
répandu dans ces échelles, serait susceptible d'attirer l'hostilité des autorités
turques sur le consul208. Le cérémonial est finalement rendu uniforme par l'ordonnance du 3 mars 1781 qui fixe le protocole des cérémonies officielles françaises
dans le Levant en ouvrant le droit aux protégés d'y participer209.
71.  Des difficultés apparaissent également quant à l'application de mesures
relevant de la police commerciale. Par exemple, l'article premier du règlement de
1706, promulgué à Alep par l'inspecteur des échelles Gastines, défend aux marchands français d'exercer aucune sorte d'activité commerciale le dimanche et pendant les fêtes religieuses. Il interdit expressément aux protégés d'effectuer des achats
aux mêmes jours afin d'éviter qu'ils n'exercent une concurrence déloyale210. Ces derniers sollicitent l'abolition de cet article du règlement aux motifs suivants :
Ils ne peuvent estre soumis à des peines pour contravention à des observations de jours que leur loy ne commande pas ; qu'ils en ont d'autres et
ceux-cy, joints aux nostres, fairaient la moitié de l'année ; qu'ils ne donnent
aucun scandalle en travaillant les jours de festes et dimanches à la différence
des François et se réduisent enfin à demander qu'au moins il ne leur soit
interdit d'acheter que les dimanches d'eux connus et non ceux de nos festes
qu'ils peuvent ignorer211.
reconnoissent la juridiction du consul que quand ils ont lieu de présummer qu'elle leur sera favorable,
mais quand ils essuyent une décision contraire ou lorsqu'avant la décision, ils craignent d'être
condamnés, ils sont les maîtres d'user du droit qu'ils ont naturellement de porter leurs procès par
devant les juges du pays, parce que la protection qu'il leur est accordé ne les dégage pas des engagemens
de leur naissance et qu'étant toujours sujets du grand seigneur, ils sont sans difficulté justiciables des
juges du pays » (Paris, BNF, ms. fr., 7194, fol. 193v-194).
205. Mémoire des principaux évènements qui se sont passés jusques aujourd'hui pendant
l'ambassade de monsieur le marquis de Villeneuve, 1735 : « Il est aisé de conclurre en tout cela que
quand les intérêts l'exigeront ils s'embarrasseront en des jugements qui auront été rendus par les
consuls et par l'ambassadeur luy même, comme cela est arrivé plusieurs fois, et que la même
contestation étant alors portée par devant les juges du pays, elles seront décidées sans égard aux
jugements qui auront été rendus par les officiers du roy, ce qui mettra leur caractère et leur autorité en
compromis » (Paris, BNF, ms. fr., 7194, fol. 194).
206. Lettre du comte de Castellane, aux échevins et députés du commerce à Marseille, 1er mai 1743
(éd. J. Weyl, « Les juifs protégés français aux échelles du Levant... », loc. cit., t. 13, p. 293) ; A. Vandal,
Une ambassade française en Orient sous Louis XV. La mission du marquis de Villeneuve, 1728-1741,
Paris, Plon, 1887, p. 362.
207. Pour l'échelle d'Alep, voir De la manière dont on perçoit le consulat du commerce que font les Juifs
en Alep, [1718] (éd. cit., t. 13, p. 281). Pour l'échelle de Salonique, voir le Mémoire contenant mes observations
sur l'état du commerce et de la nation de l'échelle de Salonique dans le voyage que j'y ait fait au mois de may
1735 par ordre de Monseigneur le comte de Maurepas, août 1736 (Paris, AN, AE, BIII 237, pièce 43).
208. De la manière dont on perçoit le consulat du commerce que font les Juifs en Alep, [1718]
(éd. cit., t. 13, p. 279-280).
209. Ordonnance concernant les consulats, la résidence, le commerce et la navigation des sujets du
roi, dans les échelles du Levant et de Barbarie, 3 mars 1781, titre I, art. 148 (éd. cit., p. 112).
210. Règlement [de Gastines] de commerce et de police pour l'échelle d'Alep, 25 septembre 1706,
art. 1er (Marseille, ACCIM, J 1575, p. 161).
211. De la manière dont on perçoit le consulat du commerce que font les Juifs en Alep, [1718]
(éd. cit., t. 13, p. 277).

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