Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 38 - Les échelles du Levant et de Barbarie - 7

PRÉFACE

Depuis une dizaine d'années, le renouveau de l'histoire économique est corrélatif d'un nouvel élan des études d'histoire du droit des affaires. Le droit, on le
sait, s'articule toujours sur des faits qu'ils soient politiques, sociaux, culturels ou
économiques. C'est du reste l'une des caractéristiques intéressantes de cette discipline que d'aucuns qualifient de science sociale. Au-delà de la terminologie, il
s'agit bien de comprendre les normes qui organisent les sociétés. Pour faciliter
cette compréhension, l'historien du droit et des institutions s'immerge dans des
sources aux traits multiples car il doit prendre la mesure de la société dans laquelle
est née telle ou telle règle de droit. De multiples facteurs viennent alors encadrer
ses analyses qu'il doit minutieusement ciseler pour restituer tout le sel d'un monde
passé et, peut-être, pour ouvrir la compréhension du monde à venir. Cette tâche
est encore plus difficile lorsque l'on y ajoute une dimension internationale avec
les incontournables conflits nés de la confrontation entre des ordres juridiques
très différents.
C'est à ce travail que M. Victor Simon, jeune agrégé des Facultés de droit,
s'est employé dans cet ouvrage issu de sa thèse de doctorat. Elle porte sur le droit
du commerce international liant la France à la Sublime Porte à l'époque moderne.
Mobilisant des sources disparates, qu'il sait utiliser à escient, M. Simon démontre,
en deux temps forts, comment on est passé d'une forme de liberté du commerce,
même si elle connaît des limites, à un dirigisme étatique né dans le contexte du
mercantilisme.
Dans la première partie, l'auteur part d'une focale large à la dimension internationale. Ce cadre permet l'établissement d'une protection spécifique, résultant
d'actes internationaux qui relèveraient aujourd'hui du droit international public.
M. Simon étudie les textes fondateurs, les libertés accordées avec des limites très
précises, tant quant aux personnes qu'aux biens. Les rôles respectifs des États et
des particuliers, bénéficiant d'un statut dérogatoire, sont analysés à l'aune d'une
documentation fournie, qui donne vie à sa démonstration. Servi par un style clair
et plaisant, on éprouve le sentiment de côtoyer ces marchands, ces administrateurs, suivant in vivo leurs pérégrinations d'un bout à l'autre de la Méditerranée.
Car M. Simon n'oublie aucune des échelles et l'on navigue des côtes turques aux
rives de la Barbarie. L'auteur nous convie à l'observation de la construction de
réseaux et de circuits, mêlant les dimensions économique et juridique des enjeux
étatiques avec une pertinence de bon aloi. Dans ce contexte, le commerce français
peut se développer selon les usages dont les fondements romains en soulignent la
vigueur.  C'est le cas notamment du contrat de commission, jadis étudié par le
professeur Gérard Sautel, qui voit son étude renouvelée sous la plume alerte du
jeune professeur. Pour accompagner le développement dans ce cadre international, les négociants français se dotent d'institutions propres afin d'agir en

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