Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 36 - Les sociétés en nom collectif au XVIIIe siècle - 139

La formalisation des accords

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qu'il recevra du chef de sa femme dans la sociétté [redite], luy payera, ainsy que les
parties en conviennent respectivement l'intérest à cinq pour cent par an ; de même
que si l'un ou l'autre associé versoit des fonds dans la sociétté au-delà de sa mise, la
sociétté leur payera le même intérest34. » Document fondateur de la société, l'acte va
être le gardien des règles que l'on s'est fixé. Écrit et rédigé, au mieux avec clarté et
sans ambiguïté, il vise notamment à prévenir les malentendus. Il est la référence sur
laquelle il conviendra de s'appuyer en cas de différend35. Il répond à sa raison d'être
et démontre son utilité.

SECTION 2
LES APPORTS36
150. L'acte de société est l'expression de la volonté des associés mais il
demeure lettre morte si les engagements qui y sont pris ne sont pas suivis d'effets. Or, le premier engagement des associés est de donner les moyens à la
société de remplir ses objectifs. C'est l'investissement personnel des associés
qui va dans la société en nom collectif en être l'élément déterminant. Il prime
sur le reste ; sans lui rien n'est possible. La société de personnes s'y reconnaît. Ce sont ses acteurs qui vont y contribuer par leur talent, leur énergie et
leur travail. Concrètement, ils vont également fournir ce qui permettra à la
société de se développer avec des apports de toute sorte : en espèces, en nature,
en industrie et sous bien d'autres formes qui ont en commun leur concours au
but recherché. C'est leur complémentarité qui est souvent attendue et qui correspond au choix qui a été fait des associés37. La réalisation de ces apports est,
au-delà de la signature de la convention qui lie les parties, le véritable acte de
naissance de la société. Pothier voit dans ces apports des associés l'esprit même
du contrat de société : « Il est de l'essence du contrat de société que chacune
des parties apporte ou s'oblige d'apporter quelque chose à la société, ou de
l'argent, ou d'autres effets, ou son travail et son industrie38. » Encore
34. Acte de société du 1er juin 1765. Baron, Le Roux. Manufacture de toiles peintes. Art 18. (AP
D3B6 66).
35. Mémoire d'arbitre 14 juin 1773. Dusmellier, Roye de Chantoiseau. Rien n'empêche de se
servir du texte d'un acte ne répondant pas et de loin à ces exigences, s'il vient à point nommé pour
défendre des créanciers menacés d'être spoliés : « Quant à l'acte de société nous n'avons point trouvé
de motifs essentiels qui puissent en faire décider la cassation. Les inexactitudes réciproques à remplir
les conditions y portées seraient de nature a mettre les parties hors de Cour, mais ce qui nous décide
plus fermement à estimer, quelle doit regler dans toute sa valeur sans pouvoir y deroger dans aucun de
ses articles c'est l'intérêt que les bailleurs de fonds doivent avoir a ce qu'il existe dans toute son etendue
tel que la Dame Le Sac qui nous a déclaré avoir pretté en vertu de cette société une somme de 1 500
livres, nous estimons que est de toute Justice de maintenir ledit acte de société. » (AP D6B6 9).
36. M. Buchberger, Le contrat d'apport Essai sur la relation entre la société et son associé, op cit,
thèse de doctorat, droit des sociétés, Université Panthéon-Assas (Paris II), 2009. Introd. § 29, p. 4 :
« L'accord des volontés ne suffit pas à démontrer l'existence d'un contrat entre la société et ses
associés ; encore faut-il qu'il en résulte des obligations et plus généralement des droits contractuels. »
37. J. Savary, op cit, Part 2, Liv 1, ch IV, p. 62 : « Celui qui est d'une humeur active, est plus
propre à l'achat & à la vente que non pas celui qui l'est moins & qui aime le repos, c'est pourquoi le
plus actif des deux associez doit être emploié à l'achat & à la vente des marchandises, & l'autre à tenir
le grand livre de raison, & la caisse ; parce qu'aiant moins de feu, il est plus sage & moderé en la
conduite des affaires sedentaires, que s'il avoit plus d'activité. »
38. R.-J. Pothier, op cit, § 8, p. 445. Cette définition est complétée aux paragraphes 11 et 12.
§ 11, p 446 : « Il est de l'essence de ce contrat que la société soit contractée pour l'intérêt commun des

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