Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 36 - Les sociétés en nom collectif au XVIIIe siècle - 304

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LES SOCIÉTÉS EN NOM COLLECTIF AU XVIIIe SIÈCLE

§ 1. UN JUSTE MOTIF
315. Les raisons qui peuvent être données par un associé pour justifier son
départ doivent être tout à la fois légitimes (A) et honorables (B)4.
A. UN MOTIF LÉGITIME
316. Plusieurs raisons peuvent conduire un associé à quitter la société indépendamment de sa volonté. Il en est ainsi lorsque l'associé est malade ou qu'il se
retire des affaires5. Le fait qu'il soit en prison pourrait être aussi un motif « légitime » : « La compagnie informée de la détention du sieur La Morlette ès prison du
Port l'Evêque de cette ville de Paris, et désirant user du droit qu'elle s'est réservée
par l'article 14 du traité de société passé devant Portier et son confrère notaires à
Paris le 29 juin 1760, elle a unanimement arrêté et délibéré de nommer, comme se
fait, elle nomme par la présente le sieur Lefebvre pour caissier de la manufacture6. »
Couchot mentionne toutefois un banquier qui y poursuit ses affaires7. Il peut aussi
être appelé à des fonctions qui ne lui permettent plus d'exercer son métier8. La
société en nom collectif est aussi marquée en tant que société de personnes par les
événements familiaux qui viennent la traverser. Dans cet esprit, un acte de société
de 1759 prévoit les conditions dans lesquelles une transmission familiale d'un commerce de librairie peut être réalisée. En s'en donnant la possibilité par une disposition de l'acte de société, il sera loisible à un oncle de céder sa part à son neveu sur le
point de se marier tout en prévoyant, le cas échéant, le sort de sa future épouse.
« Sera loisible audit Sieur Dessaint de céder tout ou partie de son intérêt de moitié
au total de la société, au sieur Nicolas Dessaint, son neveu, dans lequel cas ledit
sieur Dessaint neveu deviendra associé, même de convenir que la demoiselle
Catherine Marielle Chauchat, qu'il se propose d'épouser incessamment, reste au
4. R.-J. Pothier, op cit, § 154, p. 511 : « [...] les jurisconsultes disent que l'associé qui renonce de
mauvaise foi, ou intempestivè, dégage son associé envers lui, et ne se dégage pas envers son associé. »
5. Acte de société du 11 mars 1762. Grillet, Peroud. Joaillerie. « Lesquels ont dit que le S. Grillet
ne pouvant vaquer à son commerce à cause de son âge avancé et reconnaissant la probité et l'exactitude
du S. Terroud son parent pour l'avoir éprouvée depuis plusieurs années dans différentes affaires [...] il
l'avait requis de résider à Paris et de s'y charger de la manutention et gestion de son commerce en
qualité de son commis, pour quoi et pour assurer leur position respective, ils sont convenus de faire les
traités, accords et conventions qui suivent » (AP D3B6 63).
6. Acte de société du 29 juin 1760. Defervinière, La Morlette et alii. Manufacture de cuirs.
Délibération du 20 avril 1762 : « empêchement de La Morlette. » [...] » (AP D3B6 63).
7. Couchot, op cit, Liv 2, ch III, p. 66, sur un « Arrêt de la Cour du Parlement, par lequel toutes les
sentences des Juges & Consuls, dont étoit appel, sont confirmées & déclarées exécutoires en tout leur contenu ;
Fayard condamné en tous les dépens, & mis hors de Cour sur toutes ses requêtes présentées contre le Sieur
Claude de Santeul, [...] en date du 12 mai 1727. » Extrait sur les activités du Sr. Fayard alors qu'il était en
prison, p 68a-b : « [...] 1. Que Fayard, avant d'être emprisonné au Châtelet, faisoit la profession de
banquier, à Paris. 2. Qu'ayant été emprisonné au Grand Châtelet, il y a continué le même négoce, par
l'entremise & les soins dudit Roguier qui faisoit ses négociations. 3. Que pendant tout le tems de ladite
détention, Fayard avoit des livres sur lesquels il écrivoit journellement tout ce qui étoit négocié par ledit
Roguier, & généralement tout son commerce de banquier. 4. Que ses registres avoient été vûs, tant par une
partie des prisonniers, qu'autres personnes du dehors. 5. Que lesdits registres contenant généralement tout
son commerce avoient été portés tant au Greffe des Consuls que de la geolle du Grand Châtelet ; [...] »
8. R.-J. Pothier, op cit, § 152, p. 510 : « C'est encore un juste sujet que peut avoir un associé de
renoncer à la société avant le temps, lorsque étant obligé d'être absent pendant long-temps pour le
service de l'Etat, il ne peut plus veiller aux affaires de la société ; [...] » Ce cas de figure est celui auquel
se réfère un acte de société du 15 octobre 1797, Gebrier, Laurasson, L'Héritier, Transports militaires,
dans son article 18. : « Il en sera agi de même [à propos du départ d'un associé] dans le cas où l'un des
sociétaires serait appellé à des fonctions législatives ou diplomatiques. » (AP D3B6 97).

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