Précis Domat - Droit processuel général - 5e - 558

DROIT PROCESSUEL GÉNÉRAL
constitution86
car le juge judiciaire n'était pas saisi suffisamment rapidement. Finalement,
la loi nº 2011-803 du 6 juillet 2011 a unifié ce contentieux au profit du juge judiciaire
(JLD) qui est dorénavant seul compétent pour apprécier la nécessité de la privation
de liberté et pour connaître de la régularité des décisions administratives fondant la
mesure de soins psychiatriques sans consentement (CSP, art. L. 3216-1)87
. Après une
censure du Conseil constitutionnel, une nouvelle loi a amendé cette procédure en prévoyant
notamment qu'en cas de mainlevée d'une mesure à la suite d'un classement sans
suite ou d'une décision d'irresponsabilité pénale concernant des faits punis d'au moins
cinq ans d'emprisonnement en cas d'atteinte aux personnes (et dix ans en cas d'atteinte
aux biens), le JLD devait se prononcer sur la base d'un avis d'un collège composé de
deux psychiatres et d'un soignant88
. La loi retient le principe d'une audience du JLD
dans l'établissement en présence d'un avocat (assistant ou représentant le patient)
accueillant le patient et l'interdiction de la vidéoconférence89
.
C. LA COLLABORATION DANS LES COMPÉTENCES :
LES QUESTIONS PRÉJUDICIELLES
378 Une logique de collaboration. - La notion de question préjudicielle peut apparaître
comme universelle à un juriste français. Dès lors qu'un juge a une compétence exclusive
et qu'un renvoi de l'affaire à ce juge est nécessaire pour trancher le litige, alors les
parties voire le juge lui-même peuvent poser une question particulière. À vrai dire, cette
définition ne date que de 1912 comme l'a montré M. Casu90
qui fait référence à Glasson,
Tissier et Morel qui font de la question préjudicielle celle « dont la solution préalable
est nécessaire pour le jugement à rendre mais dont la connaissance n'appartient
pas au tribunal saisi de la demande et exige une décision distincte et séparée d'un autre
tribunal »91
.C'est Edouard Laferrière qui avait le premier proposé une réflexion trans.
Or, cette séparation est propre à la France
versale sur ces questions préjudicielles en tenant compte notamment de la séparation
des autorités administrative et judiciaire92
et on ne retrouve pas un concept impliquant une compétence exclusive dans les autres
systèmes (en droit canadien, la demande est transférée au tribunal compétent quand la
validité d'une disposition est mise en question devant un tribunal : CPC, art. 541 ; on
n'est pas loin du mécanisme de la passerelle par lequel un tribunal renvoi l'affaire à un
juge compétent93
). La traduction en anglais n'est pas tout à fait arrêtée : preliminary
ruling ou preliminary reference. Il a existé et existe encore des possibilités de poser
■ 86. CEDH, 18 nov. 2010, nº 35935/03, Baudoin c/France, JCP G 2011, 189, note K. GRABARCZYK.
■ 87. Ce partage du contentieux n'avait pas été jugé non conforme à la constitution : Cons. const., 26 nov.
2010, nº 2010-71, QPC, JCP G 2011, 189, note K. GRABARCZYK. Adde, Une demande de sortie immédiate
doit être examinée à bref délai : CEDH, 14 avr. 2011, nº 35079/06, D. 2011, act. 1137, obs. S. LAVRIC.
V. aussi A. LANDE, D. 2011, 2567, Panorama Droit de la santé. Adde M. VIALETTES et M. GROSSET,« L'unification
du contentieux de l'hospitalisation sans consentement », JCP G 2013, 157.
■ 88. Loi nº 2013-869, du 27 sept. 2013, JCP G 2013, act. nº 1046, et 1065, note M. PRIMEVERT.
■ 89. V. supra, nº 110 et 240.
■ 90. G. CASU,« Qu'est-ce qu'une question préjudicielle ? », Procédures 2016, étude nº 8 et sa thèse : Le
renvoi préalable. Essai sur l'unification préjudicielle de l'interprétation, LGDJ, 2016, t.659.
■ 91. Traité théorique et pratique de procédure civile et commerciale en justice de paix et devant les
conseils de prud'hommes, Recueil Sirey, 1912, t. 1, p. 751, nº 477, cité par G. Casu.
■ 92. E. LAFERRIÈRE, Traité de la juridiction administrative et des recours contentieux, Berger-Levrault,
1re
éd. 1887-1888, rééd. LGDJ, 1989, t. 1, p. 449, cité par G. Casu.
■ 93. CPC, art. 88.
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