Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté - Tome 21 - Les effets de l'extension de la procédure collective pour confusion des patrimoines - 216

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LES EFFETS DE L'EXTENSION DE LA PROCÉDURE COLLECTIVE
POUR CONFUSION DES PATRIMOINES

1.	 Le rejet théorique des fondements de la théorie invoquée
337.  Contestation au regard du fondement implicitement invoqué - Il doit être
rappelé à titre liminaire que l'extension de la procédure collective pour confusion
des patrimoines est un mécanisme spécifique qui, en raison de sa nature, de ses
conditions de mise en œuvre et de sa finalité, est nécessairement soumis à un
régime dérogatoire du droit commun. En tant que telle, l'appréciation de la portée
de certains des textes et principes directeurs du droit positif doit nécessairement
être renouvelée. C'est pour cette raison que Monsieur SÉNÉCHAL affirme qu'en
confondant les masses actives et passives des personnes concernées, « il s'agit
[donc] d'étendre l'assiette de la saisie collective au patrimoine d'un tiers, ce qui suppose de déroger au droit commun et, plus particulièrement, aux articles 2092 et 2093
du Code civil »153 (soulignement ajouté). Le recours aux dispositions de l'article 2284 du Code civil pour justifier la reconnaissance d'un droit personnel au
profit du créancier de la personne soumise à la procédure collective initiale, à
l'égard des autres personnes confuses en bien, apparaît dès lors contestable. Ces
dispositions, étant en partie justifiées par la théorie de l'unité du patrimoine développée par AUBRY et RAU154, ne semblent pas pouvoir servir de fondement à la
théorie de l'attribution collective du passif devant globalement être apuré au
cours de la procédure collective étendue. Justifier les effets d'un mécanisme en se
référant aux principales dispositions auxquelles ce dernier vise justement à déroger apparaît ici paradoxal.
338.  Contestation au regard de l'objet du droit de gage - Si le recours aux
dispositions de l'article 2284 du Code civil devait être considéré comme admissible, la théorie favorable à la reconnaissance d'un droit de créance à l'égard de
chacune des personnes aux patrimoines confondus pourrait être contestée au
regard de l'interprétation de l'objet du droit de gage qu'elle suppose. Le droit de
gage du créancier chirographaire porte en effet sur le patrimoine même du débiteur après la naissance de son droit155. Or la confusion des patrimoines est, par
définition, la situation dans laquelle le contenu de chacun des patrimoines ne peut
plus être précisément déterminé. En caractérisant une telle situation, le tribunal
reconnaît que le contenu ou la valeur des patrimoines confondus est indéterminable. La confusion des éléments d'actif et de passif de deux ou plusieurs patrimoines rend, par conséquent, l'objet du droit de gage de chacun des créanciers
indéterminable, certains de ces éléments pouvant se retrouver indistinctement
dans le patrimoine de l'un ou l'autre des débiteurs. Il doit alors être rappelé qu'un
créancier ne peut pas se prévaloir de son droit de gage pour saisir des biens qui
Paris X, 2005, p. 501, n° 578 : « Les créanciers ne deviennent pas simultanément , par l'effet du prononcé
de l'extension de la procédure, créanciers de chacun des groupements attraits dans la procédure collective
unique, ni créanciers d'une entité unique ». L'auteur fait ici référence aux « groupements » car il conteste
le bien-fondé de l'extension de la procédure collective pour confusion des patrimoines entre personnes
physiques : op. cit. p. 459, n° 529 et s.  - P.-M. LE CORRE, « Le sort des créances en cas d'extension
d'une procédure collective », D.  2002, p.  1222 : « Les créanciers de la première procédure ouverte
resteront créanciers de cette procédure. Ils ne deviendront pas créanciers de la seconde structure,
cependant que les actifs de cette dernière seront réunis aux actifs de la structure la première déclarée en
redressement ou en liquidation judiciaire ».
153. Respectivement devenus les articles 2284  et  2285 du Code civil, à la suite de la réforme
opérée par l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006.
154. A.-L. THOMAT-RAYNAUD, L'unité du patrimoine : essai critique, Thèse Toulouse,
2004, Défrénois, Doctorat et notariat, t. 25, 2007, p. 71, n° 159 et 160.
155. 
P. MALAURIE, L. AYNÈS, P. STOFFEL-MUNCK, Droit des obligations, LGDJLextenso, coll. Droit civil, 11e éd., 2020, p. 662, n° 745.

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