Hors collection - La confiscation des avoirs criminels - 55

	

La confiscation préventive dans la législation...	47

Comme je l'ai déjà mentionné, grâce à ses différents modèles, la confiscation en Italie est très efficace en raison de sa grande souplesse et de sa
capacité à remplir presque toutes les fonctions possibles de lutte contre
la criminalité : de la fonction de rétribution à celle de prévention générale négative (fonction d'intimidation), positive (fonction d'orientation
culturelle de la société), intégrante (fonction de stabilisation sociale par
satisfaction du « besoin collectif de la sanction »)4, de prévention spéciale
dans ses variantes de neutralisation et intimidation individuelle, pour finir
avec la fonction de compensation des individus ou de la communauté
victime des actes criminels. Pour ces raisons, on peut dire que la confiscation, dans les différentes configurations adoptées, est la mesure la plus
utilisée et en même temps la plus redoutée par la criminalité organisée.
Cependant, comme pour compenser en négatif leur multifonctionnalité et leur efficacité, les modèles de confiscation les plus « agressifs »
- c'est--à‑dire les modèles non liés à un crime précis, construits dans une
dimension nettement préventive et appliqués sur la base de simples soupçons (avec le renversement qui en résulte de la charge de la preuve5), conçus
pour frapper un catalogue très large de biens - entraînent une myriade de
problèmes théoriques et pratiques difficiles à résoudre. Il suffit de dire que
certains de ces modèles risquent d'entrer en conflit avec un grand nombre
de principes et de droits fondamentaux prévus par la Constitution et/ou la
Convention européenne des droits de l'homme : du principe de légalité6 au
droit de propriété, du principe de personnalité au principe de culpabilité,
du principe de proportionnalité des peines7 au principe de la présomption d'innocence. Or, la confiscation préventive prévue par la législation
anti--mafia est précisément, parmi tous les modèles de confiscation existant
dans le système juridique italien, le plus « agressif » : donc, le plus efficace
mais aussi le plus controversé. L'objectif de mon rapport est de définir
le contexte dans lequel ce modèle de confiscation s'inscrit, son évolution
historique, sa réglementation (c'est--à‑dire la procédure de prévention), sa
conformité douteuse avec les principes/droits de la Convention européenne
des droits de l'homme, les problèmes qui peuvent se poser dans le cadre de
la coopération judiciaire au sein de l'Union européenne.
4. Cf. G. de Vero, Corso di diritto penale, I, Giappichelli, Torino, 2012, p. 25 ss.
5. Par rapport à l'ordre juridique italien, la confiscation élargie visée à l'article 12 sexies
de la loi 356/92 et la confiscation visée à l'article 270-septies du Code pénal et introduite
par l'article 4, paragraphe 1, lettre c), de la loi 153 du 28 juillet 2016 sont emblématiques.
6. Pour ses sous--principes de la « réserve de loi », de la clarté--précision et de la non--
rétroactivité de la sanction.
7. Voir, Cour const. italienne, décision 10 mai 2019, n° 112. Dans cet arrêt, la Cour a
déclaré illégitime sur le plan constitutionnel l'article 187-sexies du décret--loi n° 58 de 1998
dans la partie où il prévoit la confiscation obligatoire, directe ou équivalente, non seulement
du profit de l'acte illicite, mais aussi du produit de l'acte en question.
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