Hors collection - La confiscation des avoirs criminels - 72

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La confiscation des avoirs criminels	

textes une jurisprudence abondante et complexe de la chambre criminelle3.
Car il faut dire qu'il n'est pas aisé de concilier le respect du principe de la
contradiction et celui du secret de l'enquête et de l'instruction.
Au reste, plus fondamentalement, peut--on véritablement se satisfaire de
ce que la saisie des biens dont la confiscation est prévue à l'article 131-21
du Code pénal soit mise en œuvre, selon les cas, par l'officier de police
judiciaire en application du droit commun des saisies pénales4 ou bien sur le
fondement des nouvelles procédures de saisie spéciale - lesquelles présentent
un caractère juridictionnel -, l'identité fonctionnelle de ces procédures ne
s'accompagnant pas d'une identité de garanties pour les intéressés ?
Surtout, l'extension de l'assiette des saisies et confiscations pénales à des
biens sur lesquels des tiers non poursuivis pénalement sont susceptibles
d'avoir des droits - comme le permet le recours à la notion de bien à la
« libre disposition » de la personne mise en cause ou condamnée5 -, pose
intensément la question de la reconnaissance de droits processuels à ces
tiers. Si, en effet, le législateur6, relayé par le Conseil constitutionnel7 et
la chambre criminelle8, ont exclu que les saisies et confiscations puissent
porter atteinte aux intérêts des tiers de bonne foi, force est en revanche de
constater qu'il n'a pas été tiré de conséquence par le législateur de cette
réserve dans l'ordre du droit processuel ; et ce alors même que la Cour
européenne des droits de l'homme a pu énoncer, sur le fondement de l'article 1er du protocole additionnel no 1, que « les personnes dont les biens
sont menacés de confiscation doivent se voir conférer le statut de partie
au procès dans le cadre duquel la confiscation peut être ordonnée »9. C'est
ainsi sur le seul fondement du droit commun que certains recours ont été
reconnus aux tiers par la jurisprudence10.
Ainsi, en définitive, à condition bien sûr de les entendre largement,
ces « droits de la défense » que le recouvrement des avoirs criminels met
à l'épreuve paraissent être tout autant ceux de la personne mise en cause
que ceux des tiers.
3. Par exemple : Cass. crim., 13 juin 2018, no 17-83893, Bull. crim. no 110 ; Cass. crim.,
13 juin 2018, no 17-86199 ; Cass. crim., 13 juin 2018, no 17-83242 ; Cass. crim., 13 juin 2018,
no 17-83894.
4. CPP, art. 56, 76 et 97.
5. C. pén., art. 131-21, al. 2, 5, 6 et 9.
6. Préc.
7. Cons. const., 26 nov. 2010, no 2010-66 QPC relevant que l'article 131-21 du Code pénal
« préserve le droit de propriété des tiers de bonne foi ».
8. Cass. crim., 7 nov. 2018, no 17-87424, Bull. crim. n 188.
9. CEDH, 16 avr. 2019, Bokova c/ Russie, req. no 27879/13, § 55 - CEDH 10 avr. 2012,
Silickiene c/ Lituanie, req. no 20496/02, § 50 - aussi : CEDH, 1er avr. 2010, Denisova et
Moiseyeva c/ Russie, no 16903/03, § 60.
10. Cass. crim., 15 janv. 2014, no 13-81874, Bull. crim., no 12 - Cass. crim., 20 mai 2015,
no 14-81741, Bull. crim. no 121 ; Gaz. Pal. 2015, no 1, p. 4, note R. Mésa.
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